Résumé : La lecture est un processus complexe qui s’appuie sur différentes connaissances. La prédiction de la reconnaissance de mots et de la compréhension écrite par des habiletés cognitives différentes souligne la nécessité d’examiner séparément ces deux habiletés de lecture. En effet, certaines études ont montré que la conscience phonologique, la mémoire à court terme et les conversions grapho-phonémiques sont des prédicteurs substantiels de la reconnaissance des mots (Kendeou et al., 2009). Par contre, d’autres études ont souligné le rôle déterminant de la compréhension orale particulièrement du vocabulaire dans la compréhension écrite (Kendeou et al., 2009; Vellutino et al., 2007).Selon l’hypothèse « Qualitative Similarity Hypothesis » (QSH) (Paul & Lee, 2010; Paul et al., 2013), les habiletés cognitives indispensables aux habiletés de lecture chez les enfants avec déficience auditive (DA) sont similaires à celles des enfants entendants malgré le décalage au niveau de l’analyse quantitative ; les enfants avec DA étant moins performants que leurs pairs entendants dans la reconnaissance de mots et dans la compréhension écrite.Le pouvoir prédictif de ces habiletés cognitives peut varier en fonction des caractéristiques de la langue alphabétique qu’elle soit indo-européenne ou sémitique ainsi qu’en fonction de la transparence de l’orthographe chez les lecteurs avec DA et chez les lecteurs entendants. Outre les habiletés cognitives, le processus de chacune des habiletés de lecture est influencé par l’aspect sociolinguistique imposé par la langue comme la diglossie dans la langue arabe.Les recherches conduites sur la lecture chez les lecteurs arabophones avec DA sont peu nombreuses. Elles ne sont pas suffisantes pour comprendre les processus de lecture en fonction de la contribution des habiletés cognitives et les mécanismes de lecture à voix haute dans la situation de diglossie.L’objectif du travail de notre thèse est de mieux interpréter le processus de lecture à voix haute de mots et de pseudo-mots et le processus de compréhension écrite ainsi que de déterminer les mécanismes de la lecture à voix haute chez les enfants arabophones libanais avec DA. Le premier chapitre présente le contexte théorique de la thèse représentant des modèles théoriques de reconnaissance de mots et de compréhension écrite et les habiletés associées aux habiletés de lecture chez les enfants entendants et les enfants avec DA. Les chapitres empiriques 2, 3 et 4 concernent les mêmes groupes de participants : un groupe d’enfants libanais avec DA en G4, G5 et G6 évalués dans une approche longitudinale étalée sur 12 mois (T1-T2) et un groupe d’enfants entendants évalués dans une approche transversale, les deux groupes étant appariés sur la compréhension écrite du T1. Ces chapitres présentent les études expérimentales qui ont nécessité la construction d’une batterie d’épreuves qui répondent à l’objectif de chaque chapitre. Le chapitre 2 investigue le modèle de compréhension écrite « Simple View of Reading » (SVR) chez les deux groupes de participants ainsi que le rôle du vocabulaire écrit dans la compréhension écrite. De plus, il compare les stratégies de compréhension écrite adoptées par les enfants avec DA et les enfants entendants. Le chapitre 3 s’intéresse aux mécanismes des mesures de lecture (exactitude et vitesse) en fonction des effets psycholinguistiques dans le cadre du Dual-route cascade model (DRC) et de l’analyse des erreurs. Le chapitre 4 vise à étudier le pouvoir prédictif de la lecture labiale sur chacune des habiletés de lecture en présence d’une autre habileté cognitive, la lecture labiale étant un prédicteur déterminant chez les lecteurs avec DA. Ce chapitre vise également à déterminer les habiletés cognitives (conscience phonologique, mémoire de chiffres à l’envers et mémoire visuelle d’ordre sériel) qui prédisent l’exactitude de lecture d’une part et la compréhension écrite d’autre part. Le chapitre 5 représente la discussion générale se basant sur l’ensemble des résultats des trois études expérimentales.