Résumé : Le phénomène des données massives suscite de nombreux discours, qu’ils soient scientifiques, politiques ou journalistiques, notamment sur ce qu’elles font à la démocratie. Cependant, les travailleurs de la donnée, et plus largement, le processus de fabrication de cette donnée dans les médias, organe démocratique majeur, sont peu étudiés. Cette thèse propose d’étudier la fabrique de données massives à partir d’une ethnographie portant sur différents départements informatiques d’organisations médiatiques belges francophones. Pour ce faire, elle s’appuie sur quatre techniques d’enquête – shadowing, observations directe et participante, ainsi que des entretiens –, mobilisées de façon itérative. En articulant trois courants académiques que sont l’économie politique, l’analyse stratégique de la sociologie des organisations et l’approche constitutive de la communication organisationnelle, le cadrage théorique propose une approche communicationnelle de l’organisation médiatique en montrant qu’elle se constitue au fil des interactions entre agents humains et autres-qu’humains. Les résultats montrent ce que la donnée fait (faire) aux acteurs de l’organisation médiatique, et inversement, ce que ces derniers lui font faire, en interrogeant cette dynamique en termes de rôles, d’identités, de sens, de règles et de pouvoir. Comme je le montrerai, les différents agencements produits par les interactions participent à façonner une réalité organisationnelle orientée sur la quantification, l’automatisation et la convergence d’agents. L’objectif est de montrer comment le couple donnée-travailleur reconfigure l’organisation et par-delà, conditionne l’accès des citoyens à l’information.