Résumé : Cette thèse cartographie la place des enseignements relatifs aux religions au niveau secondaire en Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), tout en cernant les enjeux (politiques, épistémologiques et éducatifs) qui sous-tendent les débats sur la place de la religion à l’école. Pour répondre à l’ambition cartographique descriptive, l’enquête se concentre tant sur les cours de religion (catholique, protestante, islamique, orthodoxe et israélite) que sur les cours étant amenés à aborder le thème de la religion en classe (morale, histoire, français et philosophie et citoyenneté). L’idée est également, dans une visée explicative, de montrer comment les équilibres historiques, institutionnels et sociétaux entre les différentes religions et convictions – dans la partie francophone de la Belgique – se traduisent dans les politiques curriculaires et les pratiques pédagogiques. La première partie se concentre sur l’influence du cadre juridique international à travers l’analyse des droits et libertés qui encadrent la problématique et celle des recommandations du Conseil de l’Europe en matière d’enseignement des faits religieux et plus largement d’éducation à l’interculturalité. Ce détour international permet d’élaborer un continuum de l’enseignement relatif au religieux en Europe et au Québec, passant en revue les différentes manières d’inclure le religieux dans les grilles scolaires. Cette démonstration permet de mieux comprendre les spécificités du cas belge puisque se côtoient sur les bancs des écoles la plupart des dispositifs à l’œuvre dans les systèmes scolaires européens. Les débats entourant la création et l’introduction de l’éducation à la philosophie et à la citoyenneté ont réactualisé des dissensions politiques entérinées dans le contexte d’une société pilarisée et qui sembleraient être toujours à l’œuvre (principalement sur les concepts de citoyenneté, de philosophie et de laïcité/neutralité). La deuxième partie se place dans le champ de la sociologie des curriculums. Le corpus est composé des documents scolaires (programmes et référentiels) des cours de religion et de morale ainsi que ceux des cours généraux d’histoire, de français et de philosophie et citoyenneté. Deux collections de manuels scolaires d’histoire font également l’objet d’une analyse à part entière, afin d’établir une réelle cartographie des prescrits curriculaires en vigueur concernant les contenus pédagogiques. Ces analyses viennent confirmer le caractère éclaté et pluriel ainsi que pilarisé de l’approche de la religion dans l’enseignement secondaire en FWB. Pour les cours de religion, deux types d’approches sont mises en lumière (théologique et spirituelle). Pour les cours non confessionnels, on observe une pluralité d’approches des faits religieux ([inter]culturelle, historique, politique et critique). Les troisième et quatrième parties se basent sur des données empiriques quantitatives et qualitatives récupérées auprès des enseignant·es considéré·es par la problématique (le dépouillement de 362 questionnaires et une série de 21 entretiens semi-directifs). En étant attentive aux dimensions disciplinaire, pédagogique, didactique, éthique, institutionnelle et relationnelle du métier d’enseignant·e de religion/des faits religieux, la troisième partie présente globalement les approches privilégiées (déclarées) par les enseignant·es en classe pour enseigner la religion/les faits religieux et les principales caractéristiques de ce type d’enseignement. La quatrième partie vient mettre en perspective l’ensemble des données établies à partir de trois hypothèses explicatives des résultats (les convictions des enseignant·es ; leurs générations et leurs formations et leur réseau scolaire d’appartenance).
This thesis maps the place of religious education at secondary level in the Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), while identifying the issues (political, epistemological and educational) underlying debates on the place of religion in schools. To meet the descriptive cartographic ambition, the survey focuses both on religion courses (Catholic, Protestant, Islamic, Orthodox and Israelite) and on courses that deal with the theme of religion in class (moral, history, French and philosophy and citizenship). The idea is also to show how historical, institutional and societal balances between different religions and beliefs - in the French-speaking part of Belgium - are reflected in curricular policies and pedagogical practices. The first part focuses on the influence of the international legal framework, through an analysis of the rights and freedoms that frame the issue and of the Council of Europe's recommendations on the teaching of religious facts and, more broadly, on education for interculturality. This international detour makes it possible to draw up a continuum of religious education in Europe and Quebec, reviewing the different ways in which religion is included in school curricula. This demonstration provides a better understanding of the specificities of the Belgian case, since most of the mechanisms at work in European school systems can be found side by side on school benches. The debates surrounding the creation and introduction of philosophy and citizenship education have revived political dissensions that were entrenched in the context of a pillarized society, and which would appear to be still at work (mainly on the concepts of citizenship, philosophy and secularism/neutrality). The second part focuses on the sociology of curricula. The corpus is made up of school documents (curricula and syllabuses) for religion and ethics courses, as well as for general history, French and philosophy and citizenship courses. Two collections of history textbooks are also analyzed in their own right, in order to establish a real cartography of the curricular prescriptions in force concerning pedagogical content. These analyses confirm that the approach to religion in FWB secondary education is fragmented, pluralized and pillarized. For religion courses, two types of approach are highlighted (theological and spiritual). For non-denominational courses, we observe a plurality of approaches to religious facts ([inter]cultural, historical, political and critical). The third and fourth parts are based on quantitative and qualitative empirical data collected from the teachers involved in the study (362 questionnaires and 21 semi-structured interviews). Focusing on the disciplinary, pedagogical, didactic, ethical, institutional and relational dimensions of the profession of teacher of religion/religious facts, the third part presents the approaches preferred (declared) by teachers in the classroom to teach religion/religious facts, and the main characteristics of this type of teaching. The fourth section puts all the data into perspective, based on three hypotheses that explain the results (teachers' beliefs, their generation and training, and the school network to which they belong).