par Medard Inghilterra, Robin
Référence Revue du droit public et de la science politique en France et à l'étranger, 1, page (235-274)
Publication Publié, 2021-01-01
Article révisé par les pairs
Résumé : Les dernières élections et le contentieux récent ont permis de replacer l’abstention électorale sur le devant de la scène en 2020. La doctrine publiciste est pourtant maigre sur le sujet et, lorsque l’abstention est évoquée, elle l’est dans le cadre d’une analyse politique ou afin d’envisager les modalités qui permettent de remédier à l’absence de participation des électeurs. Cet article souligne la nécessité et la viabilité d’un discours complémentaire, proprement juridique, sur l’abstention électorale. Il dresse pour ce faire un état des lieux des effets juridiques qui lui sont conférés par le législateur, le juge de la constitutionnalité des lois et le juge de l’élection, lesquels l’envisagent dans le cadre de leur activité normative. Le législateur conçoit l’abstention en tant que composante de plusieurs modes de scrutin, de manière plus ou moins déterminante, en tenant compte des spécificités et contraintes diverses du régime représentatif et de la démocratie participative. Le juge de la constitutionnalité des lois la mobilise progressivement dans sa motivation, essentiellement aux fins de justification des décisions de conformité qui illustrent sa doctrine classique d’autolimitation. Quant au juge électoral, il l’érige en facteur d’appréciation de la sincérité du scrutin, à la fois dans l’hypothèse de circonstances particulières – qui créent une inégalité entre les candidats ou entravent le libre exercice du droit de vote – et en cas d’irrégularités commises au cours du processus électoral. Cet état des lieux, fondé sur un examen approfondi de la jurisprudence, permet, en définitive, de démontrer que l’abstention électorale constitue un objet à part entière du droit public.