Résumé : Il est largement admis que les victimes de discrimination fondée sur des critères traditionnels tels que le sexe, la race, la religion, etc. sont surreprésentées parmi les populations pauvres et sous-éduquées. Les personnes vivant dans la pauvreté sont également discriminées en raison de leur situation socio-économique et des stéréotypes, des préjugés et de la stigmatisation dont ils sont l’objet. Si de nombreuses clauses anti-discrimination nationales, européennes et internationales interdisent à tout le moins implicitement la discrimination fondée sur la situation socio-économique d’une personne, elles s’avèrent très rarement utilisées dans la pratique. Il existe peu de jurisprudence à ce sujet aux niveaux national, international et européen. Une telle situation est surprenante, notamment dans le contexte de la crise financière post-2008 et plus récemment de la crise sanitaire et économique liée à la Covid-19, et au regard des nombreux traitements défavorables dont font l’objet certaines personnes parce qu’elles sont sans emploi, sous-éduquées, pauvres ou sans-abris. Adoptant une approche intégrée des droits humains, le présent article soutient que l’interdiction de la discrimination fondée sur la situation socio-économique est un outil juridique dont le potentiel est sous-utilisé et qui présente une triple valeur ajoutée – politique, sociale et juridique - pour la protection des personnes socio-économiquement défavorisées. Cela se vérifie en particulier relativement aux questions de reconnaissance, en raison notamment du rôle déterminant de ce critère dans la lutte contre les stéréotypes, les préjugés et la stigmatisation des personnes pauvres et sous-éduquées.