Résumé : Les politiques de soutien au revenu des ménages se déclinent sous formes de mesures variées mises en place dans le cadre du système de protection sociale. Ces politiques influencent considérablement le revenu et les conditions de vie des ménages les plus vulnérables. Elles constituent un levier majeur pour réduire la pauvreté et les inégalités de revenu entre ménages. De ce fait, elles contribuent à améliorer la santé des populations et à réduire les inégalités sociales de santé (ISS) dès la naissance. L’évaluation de l’impact des politiques sociales sur les ISS dans différents contextes constitue une tâche complexe, du fait notamment de la difficulté, voire l’impossibilité, de mettre en place des études randomisées à grande échelle. Les variations des politiques sociales selon les pays constituent des opportunités pour mener des études comparatives sur base d’expériences naturelles. En partant d’un constat sur les limites des études comparatives habituelles, nous avons proposé une démarche de recherche visant à mieux étudier les spécificités des contextes afin d’expliquer les mécanismes par lesquels la combinaison des politiques de soutien au revenu influence la pauvreté des ménages et contribue aux ISS à la naissance à Bruxelles et à Montréal. Ce protocole de recherche a fait l’objet d’un 1er article. Le cœur de la thèse comprend trois parties. La première partie porte sur la comparaison des politiques d’aide sociale et d’allocations familiales en Belgique et au Québec et analyse les impacts sur l’intensité de la pauvreté des ménages à l’aide sociale dans les deux contextes. L’analyse se base sur la méthode des familles-types. Cette méthode consiste à calculer et comparer le revenu disponible de différents types de ménages. L’intensité de la pauvreté des ménages a été estimée selon le nombre d’enfants et la situation de couple. Pour chaque type de ménage, elle correspond à la différence relative entre le revenu disponible du ménage et le seuil de pauvreté relative. Les résultats montrent une intensité de la pauvreté plus marquée au Québec qu’en Belgique. Dans chaque contexte, on constate également que l’intensité de la pauvreté des ménages varie considérablement selon le nombre d’enfants et la situation de couple. Ce travail a fait l’objet d’un 2ème article. La deuxième partie porte sur la description des inégalités de santé à la naissance à Bruxelles et à Montréal. Les hypothèses de travail découlent des résultats obtenus à l’étape précédente. Deux études de cas ont été réalisées et analysées dans une perspective comparative. Les bases de données utilisées proviennent du couplage de données administratives issues des registres de naissance et des données de sécurité sociale. Les résultats ont donné lieu aux 3ème et 4ème articles. Le 3ème article concerne la population générale. Dans chaque région, des modèles de régression logistique ont été élaborés afin d’étudier l’association entre les issues défavorables de la grossesse (faible poids à la naissance, prématurité) et le statut socioéconomique (éducation de la mère et revenu). L’ampleur des inégalités de santé est plus marquée à Montréal qu’à Bruxelles et celles-ci diffèrent également selon l’origine de la mère. Le 4ème article porte spécifiquement sur la population bénéficiaire de l’aide sociale. Il compare l’association entre le faible poids à la naissance et la composition de ménage dans chaque région. On constate que les inégalités face au FPN varient selon le nombre d’enfants et la situation de couple entre les deux contextes, dans le même sens que les différences observées au niveau de la pauvreté. La troisième partie explore davantage les différences constatées à l'étape précédente selon l’immigration. Dans chaque région, elle compare l’impact du SES sur la santé périnatale chez différents groupes d’immigrés et les chez les mères nées en Belgique ou au Canada. Les résultats ont donné lieu aux 5ème et 6ème article de la thèse. L’analyse souligne l’importance de tenir compte des enjeux liés à l’immigration pour mieux expliquer la contribution des politiques de soutien au revenu aux ISS à la naissance. Cette thèse constitue une contribution unique. Dans deux régions où les taux de pauvreté et les prévalences des issues de la grossesse sont comparables dans la population générale, on constate des différences notables quant aux inégalités de santé à la naissance. Les politiques de soutien au revenu dans les deux contextes contribuent à expliquer ces différences. L’analyse démontre la nécessité de remédier aux insuffisances de ces politiques dans les deux contextes. Finalement, elle souligne les défis de la réduction de la pauvreté. Ces défis touchent à différents domaines, notamment la conciliation travail-famille, le marché du travail, l’immigration et les inégalités économiques.