Résumé : Thèse réalisée dans le cadre d'une collaboration avec UCB Pharma et la région Wallonne s'inscrivant dans le cadre du projet SAS. Le but de ce projet était de développer des implants sous-cutanés imprimés en trois dimensions pour permettre une libération d’anticorps thérapeutique de manière prolongée au cours du temps. En effet, les thérapies disponibles sont souvent administrées par voie intraveineuse, ce qui peut réduire la compliance des patients dû à l’inconfort et à la fréquence de ces administrations. Les systèmes de délivrance, tels que des implants, peuvent limiter les fréquences d’administration grâce à l’insertion d’un dispositif qui libèrera le principe actif au cours du temps durant une période donnée. Les implants s’inscrivent comme une alternative aux microsphères qui sont également des dispositifs développés et investigués en vue de favoriser l’adhésion et la compliance des patients. L’avènement du 3D dans le milieu pharmaceutique a montré une certaine frénésie liée au développement de la médecine personnalisée et à l’innovation du procédé dans ce secteur. La sélection d’un matériau biocompatible et biorésorbable tel que le PLGA représente une véritable plus-value dans le développement d’implant. Etant donné que ces implants sont biodégradables, le retrait n’est pas à envisager, ce qui limite les désagréments du patient à un seul acte chirurgical lors de l’implantation. Au cours de ce travail, une approche pragmatique a d’abord été abordée sur les procédés d’extrusion à chaud et de l’impression 3D en utilisant un polymère couramment employé dans l’impression grand public, le PLA. L’investigation des paramètres d’impressions (température d’impression, epaisseur de couche et vitesse d’impression) et l’usage de divers plastifiants (la triacétine (TA), le polyethylène glycol 400 (PEG 400), le citrate de triéthyle (TEC) et l’acétyle citrate de triéthyle (ATEC)) pour faciliter les procédés à chaud et dans l’idée de réduire les températures d’extrusion et d’impression du matériau ont été évalués. Ces essais ont démontré l’effet de la température d’impression sur la qualité de l’impression et principalement sur les propriétés du matériau comme la force de traction et la ductilité. De plus, l’ajout de plastifiant à la matrice du PLA a permis de diminuer sa température de transition vitreuse. Par exemple, la température de transition vitreuse du PLA a été diminuée de 53 °C à 34 °C par l’ajout de PEG 400. Cette approche avait pour but d’évaluer la possibilité de diminuer les températures d’impression dans l’optique d’encapsuler à chaud un anticorps sensible à la chaleur pour la suite de ce travail.Ensuite, le développement de filaments imprimables contenant des anticorps a été abordé et mis en place à l’aide d’un modèle d’anticorps polyclonal disponible en grandes quantités et à des coûts relativement faibles. Un anticorps à l’état solide a été favorisé dans le procédé car il est largement accepté que les protéines sous forme solide sont plus stables au cours du temps en comparaison aux solutions d’anticorps. De plus, cet état solide facilite les manipulations précédant l’extrusion comme l’étape de mélange. Pour la réalisation des filaments, différents types de PLGA ont été investigués afin d’atteindre les propriétés nécessaires à l’impression en termes de diamètre mais également de comportement physique. Ces dérivés étaient caractérisés par des masses moléculaires différentes comme pour le PDLG5004 (44 kDa), le RG502 (7-17 kDa) et parmis eux, un copolymère PEG-PLGA (2 kDa-20 kDa). Un PLGA de faible masse moléculaire a été sélectionné pour développer ce filament. En effet, les extrusions étaient réalisables à une température maximum de 90 °C et les impressions à 113 °C minimum. L’un des enjeux cruciaux du développement de filament imprimable contenant un anticorps à haute concentration, au minimum 15% (w/w), était d’en assurer l’homogénéité. Cependant, l’usage de températures aussi élevées lors de l’impression a induit la dégradation de l’anticorps par la formation d’agrégats et principalement de fragments. Ces derniers sont généralement produits lors de procédé à haute température ou par l’usage de conditions drastiques telles que l’acidification du milieu. Cette plateforme a été adaptée à l’encapsulation d’anticorps thérapeutique fournit par UCB Pharma. L’usage d’un anticorps monoclonal possédant une stabilité supérieure à celle du modèle initialement utilisé permettrait d’identifier l’impact du procédé sur l’intégrité de l’anticorps. La formulation de l’anticorps a été réalisée en utilisant différents stabilisants conventionnels (sucrose (Suc), trehalose (Tre), 2-Hydroxypropyl-beta-cyclodextrine (HP-β-CD), inuline (Inu) et sorbitol (Sor)) et reconnus pour la stabilisation des protéines. A côté des excipients ajoutés, différentes quantités d’excipients ont été investigués. Ces manipulations ont montré que la stabilité de l’anticorps était privilégiée à l’aide du sucrose et du tréhalose à un ratio anticorps monoclonal:excipient de 2.0:1. En gardant ce ratio, l’ajout d’un acide aminé (leucine) aux deux disaccharides précédemment cités, a amélioré la stabilité de l’anticorps vis-à-vis des procédés à chaud (extrusion et impression 3D). L’homogénéité au sein des filaments imprimables et des pièces 3D a été confirmée tout au long du procédé. En effet, les charges en anticorps étaient similaires à la charge théorique de 15% (w/w). Aucune fragmentation de l’anticorps n’a été observée à l’issue des procédés à chaud. Cependant, une augmentation des agrégats de 2.6% en solution à 3.6% après impression 3D a été constatée à la fin du processus. Après avoir stabilisé l’anticorps, le but premier étant d’en promouvoir une libération prolongée au cours du temps. Les profils ont révélé une libération en trois phases au cours du temps mais avec un relargage après 24h relativement faible (< 5%) dû à la densité des matrices polymériques. Ensuite, la dégradation du polymère représente l’élément limitant la libération de l’anticorps au cours du temps. En effet, l’érosion du polymère joue un rôle clé dans la libération de l’anticorps encapsulé. La libération au cours du temps a été démontrée sur une période allant jusqu’à 15 semaines. La stabilité de l’anticorps dans le milieu de dissolution a été évaluée et une dégradation de celui-ci au cours du temps a été observée. Cette dégradation est principalement liée à l’érosion du polymère et à l’acidification du milieu au cours du test de dissolution. Après avoir optimisé la formulation de l’anticorps et avoir démontré la libération prolongée de celui-ci, son affinité restait à être étudiée. La capacité de l’anticorps à se lier à sa cible a pu être démontrée après 24h de dissolution mais cette affinité s’est réduite au cours de la durée de la dissolution avec une augmentation de l’agrégation et de la fragmentation de l’anticorps. Une étude de stabilité a également démontré que les implants imprimés en 3D sont stables à une température 5 °C sur une durée de 6 mois. Aucun élément de dégradation n’a été observé au cours du temps et l’affinité de l’anticorps a été préservée au cours de l’étude. Finalement, cette plateforme a également été évaluée pour l’encapsulation d’une troisième molécule biologique, un fragment d’anticorps monoclonal, pour d’une part en estimer la stabilité et l’applicabilité et d’autre part envisager une prochaine étude pré-clinique sur rongeurs. Le fragment d’anticorps a montré une stabilité supérieure à celle de l’anticorps monoclonal avec une faible agrégation après l’extrusion et l’impression. La libération prolongée du fragment a été évaluée sur 8 semaines et une libération du fragment de 79% a été observée avec une formulation contenant du tréhalose et de la leucine. En effet, les fragments d’anticorps ont une demi-vie plasmatique relativement faible, de l’ordre de 28 minutes, ce qui donne tout son sens à des systèmes à libération prolongée. Pour finir, la réalisation d’une étude pré-clinique permettrait de valider le modèle. En conclusion, ce travail a démontré la faisabilité de l’usage de l’impression 3D en vue de développer des systèmes à libération prolongée contenant des anticorps et en utilisant des procédés à hautes températures. Ces implants ont été caractérisés par une stabilité favorable et une libération intéressante qui feront l’objet d’investigation lors d’études pharmacocinétiques.