par Brogniez, Laurence
Référence « Quand on sort en ville : Culture, divertissement et débauche dans l’espace urbain (18e-21e siècles) (Université libre de Bruxelles)
Publication Non publié, 2017-05-19
Communication à un colloque
Résumé : Si, dans le Bruxelles du XIXe siècle, l’« homme de pavé » arpente la cité en quête d’observations, de faits divers, de camaraderies ou de plaisirs plus ou moins clandestins, la femme qui se hasarde seule sur les trottoirs est une créature suspecte, dont les déplacements sont volontiers surveillés, contrôlés, voire censurés.Nous envisagerons dans cette étude la question de la place réservée aux femmes dans la ville et celle du droit à la flânerie, cette pratique urbaine hautement valorisée comme moyen d’appréhender la ville moderne, ses rythmes, ses images, ses modes d’interaction. Si l’artiste se fait « marcheur » du grand espace urbain, la féminisation du terme renvoie quant à elle à la prostitution : la « marcheuse » est en effet perçue comme une racoleuse, une raccrocheuse. La femme qui cherche à investir et à s’approprier l’espace public se voit soupçonnée d’être « femme publique ». Ce hiatus entre flâneur et flâneuse, tel que l’a envisagé Catherine Nesci pour Paris (Le flâneur et les flâneuses : les femmes et la ville à l'époque romantique, 2017), montre bien l’inégalité spatiale entre les sexes et rappelle combien, au XIXe siècle – mais sans doute encore aujourd’hui, dans une certaine mesure –, la ville est un lieu de différenciation et de discrimination genrée.En sollicitant des textes littéraires, à la fois comme sources pour documenter l’espace bruxellois, mais aussi comme objets esthétiques à part entière construisant et modelant cet espace en fonction de leur finalité et de leurs codes propres, nous interrogerons la dimension fictionnelle, symbolique et affective dont la littérature dote les lieux pour dessiner une géographie genrée, fortement orientée et polarisée.