par Malcorps, Sylvain
Référence ALE 2018: Ethnographie et négociation (Avril 2018: Université de Lausanne)
Publication Non publié, 2018-04-26
Communication à un colloque
Résumé : Cette communication propose de revenir sur les premiers pas d’une enquête de terrain débutée en septembre 2015 au sein de la rédaction en ligne du quotidien économique et financier belge francophone L’Echo, publié par l’entreprise de presse Mediafin. Toujours en cours, ce travail consiste en une recherche-action qui avait pour objectif initial de mener les équipes concernées — notamment la rédaction en ligne de lecho.be et les départements commerciaux de Mediafin — à “réfléchir et proposer des stratégies (quantitatives et qualitative) visant à mieux comprendre l'audience en ligne de la société et à dégager des savoirs, des pratiques amenant ce public à "se fidéliser" aux productions de la maison”. Et ce, en recourant à différents outils de l’enquête ethnographique comme les séances d’observation, les entretiens ou des focus groups. Si, du fait de son caractère itératif, cette recherche-action vise à désormais à comprendre les enjeux liés à l’échange d’informations à propos de l’audience en ligne entre les journalistes de lecho.be et le service marketing de l’entreprise, elle n’en a pas moins nécessité des efforts de négociation pour avoir l’autorisation d'accéder aux espaces de travail, aux équipes et à certaines données jugées comme stratégiques par Mediafin.Le carnet de notes lié à cette recherche-action conserve les traces des négociations successives et/ou parallèles, ainsi que des stratégies “visant à convaincre” qui les sous-tendent. En repartant des dimensions des “pratiques de négociation” présentées dans l’appel à communication, cette présentation reviendra sur les tactiques employées pour accéder aux éléments susmentionnés. J’évoquerai d’abord (1) les aspects techniques et pratiques de la négociation en montrant comment le fait de travailler avec un “parrain” au sein de la rédaction de Lecho.be m’a permis de reformuler et préciser mon projet de recherche à destination de la direction de l’entreprise. J’expliquerai comment j’ai utilisé mon réseau personnel d’ancien journaliste pour trouver ce parrain et je reviendrai sur les avantages et autres défis liés au travail de terrain avec un tel partenaire. Je reviendrai également sur le recours à l’assentiment de la direction de l’entreprise — obtenu à la suite d’une réunion de présentation du projet de recherche — comme un élément clef de l’accès au terrain. J’évoquerai aussi l’usage d’interviews réalisées, au début du terrain, dans des lieux visibles par tous au sein de l’entreprise comme un moyen de gagner en légitimité face aux acteurs présents. Je parlerai (2) des aspects formels et juridiques de la négociation en réfléchissant à l’importance qu’a pu avoir la signature d’une “convention de collaboration” par la direction de l’entreprise, l’université et moi-même. Signée au début du projet, ce document n’a jamais été redemandé par l’entreprise, n’est au final jamais évoqué — il semble avoir été oublié — mais a permis de sécuriser et formaliser le cadre des interactions à venir. Enfin, j’aborderai (3 et 4) les aspects rhétoriques et éthiques de la négociation pour l’accès au terrain de recherche en détaillant comment certaines caractéristiques liées à la pratique de la recherche-action m’ont permis de persuader mon parrain, la direction et mes premiers interviewés chez mediafin de travailler en collaboration avec moi. La recherche-action repose notamment sur des principes d’équivalence entre le chercheur et les acteurs, d’explicitation régulière des activités, de réflexivité; le tout dans l’optique d’apporter un changement à une situation jugée comme problématique par un groupe d’acteurs donné (voir e.g. Réhaume, 1982; Morin, 1985; Liu, 1997). Ces éléments ont été perçus comme prometteurs par la rédaction en ligne de Lecho.be, tout comme par la direction lorsque j’ai évoqué les potentielles retombées économiques du projet pour l’entreprise.Cette communication ambitionne donc de revenir sur les différents éléments qui, repérés a posteriori, ont permis à une recherche-action en entreprise de pouvoir se dérouler. Elle mettra également ces divers éléments en discussion avec la littérature sur les pratiques de négociation, avec pour objectif de contribuer à la réflexion sur les pratiques de recherche en sciences sociales.