Résumé : Les réponses immunitaires en début de vie sont d’une efficacité limitée vis-à-vis de certains pathogènes en raison de particularités physiologiques du système immunitaire fœtal/néonatal. Elles justifient la logistique de l'administration tardive des vaccins, plutôt dans l'enfance que pendant la période néonatale, ce qui retarde la protection contre les maladies infectieuses, principale cause de morbi-mortalité chez les jeunes enfants. Le système immunitaire néonatal est initialement polarisé vers des réponses régulatrices et le développement de réponses Th2 afin de limiter les réponses inflammatoires trop intenses et délétères associées à une réponse de type Th1 qui pourrait être induite par « l’assaut microbien » qu’il subit dès sa naissance (colonisation par le microbiome). Pour cette raison, les cellules dendritiques néonatales, centrales dans l’activation des lymphocytes T naïfs, sont moins performantes que les adultes, et le gène de l’IFN-g est hyperméthylé dans les lymphocytes T CD4+. Cela limite le développement des lymphocytes Th1, essentiels pour la lutte contre les pathogènes intracellulaires. Cependant, dans des travaux précédents, nous avons montré que les nouveau-nés congénitalement infectés par Trypanosoma cruzi développent une réponse immunitaire T spécifique de type 1 (une forte réponse CD8+ et une plus faible réponse CD4+) avec production d’IFN-g. Afin de mieux cerner les mécanismes impliqués dans l’initiation de la réponse immunitaire néonatale chez ces nouveau-nés, nous nous sommes intéressés aux cellules dendritiques (DCs), essentielles à l’initiation de la réponse immunitaire. Nous résultats montrent qu’in vitro, les trypomastigotes vivants de T. cruzi activent les cellules dendritiques myéloïdes (mDC) de sang de cordon provenant de nouveau-nés sains. Ils induisent l'expression des molécules CD40, CD80 et CD83 à leur surface, les rendant aptes à stimuler la prolifération des LT CD4+ et CD8+ (avec une réponse CD8+ dominante) associée à la production d’IFN-g, témoignant d’une réponse de type 1. Nous montrons également que les IgG spécifiques de T. cruzi d’origine maternelle augmentent l'expression des molécules de co-stimulation induite par les parasites sur les mDCs néonatales, renforçant ainsi le développement des DCs compétentes. D’autre part nous avons mis en évidence que l’infection intracellulaire des mDCs n'est pas nécessaire à leur activation. Les proportions de cellules exprimant CD40 et CD80 ainsi que le niveau d'expression de ces molécules, étaient similaires parmi les cellules infectées et non infectées. Un lysat de T. cruzi induit également l'expression de ces molécules de co-stimulation. Ces données indiquent que la viabilité des trypomastigotes n'est pas indispensable à l’activation des mDCs. Nous avons aussi remarqué que la susceptibilité des leucocytes à l'infection par T. cruzi varie suivant le type cellulaire. Les DCs sont nettement moins susceptibles à l’infection que les monocytes et les granulocytes, laissant entrer un nombre plus limité de parasites. L’ensemble de ces résultats indique que T. cruzi est capable d’activer des DCs myéloïdes néonatales qui favorisent une réponse de type 1 et, fait intéressant, que les Ac maternels spécifiques du parasite accroissent leur activation, contribuant ainsi avec le parasite à surmonter « l’immaturité » du système immunitaire néonatal.