Résumé : Les micropolluants sont des composés ayant un impact négatif sur les organismes de l’environnement et ce, même lorsqu’ils sont présents à de très faibles concentrations (ng L−1 au µg L−1). Une vaste gamme d’impacts est liée à la présence des micropolluants, notamment des problèmes de toxicité à long et court termes, des problèmes de perturbation endocrinienne et le développement d’antibiorésistance.Comme les stations d’épuration (STEPs) actuelles n’ont pas été conçues pour éliminer les micropolluants, elles constituent une importante source de relargage de micropolluants dans l’environnement. Un moyen alternatif de traiter les micropolluants serait l’utilisation de laccases. Les laccases sont des enzymes produites principallement par les champignons de la pourriture blanche du bois et qui sont capables de catalyser l’oxydation d’un substrat avec la réduction simultanée d’oxygène en eau. Le substrat oxydé forme un radical réactif qui peut alors intervenir dans des réactions non-enzymatiques comme la réticulation de monomères, la dégradation de polymères ou le clivage de cycles aromatiques. Les laccases sont capables d’oxyder, de polymériser ou de transformer des composés phénoliques ou anthropogéniques en des dérivés moins toxiques.Dans les milieux aquatiques réels, comme les effluents de STEPs, les micropolluants sont présents sous forme de mélanges. La présence de ces mélanges peut mener à des problèmes d’écotoxicité plus importants que ceux observés dans avec des solutions ne contenant qu’un seul micropolluant. Par exemple, il a été montré qu’un mélange de différents anti-inflammatoires non-stéroïdiens (diclofénac, ibuprofène, naproxène et acide acétylsalicylique) était considérablement toxique pour le crustacé planctonique Daphnia et l’algue verte planctonique Scenedesmus subspicatus même à des concentrations auxquelles ces anti-inflammatoires seuls ne provoquaient que très peu ou pas d’effets. La présence de micropolluants sous forme de mélanges dans les milieux aquatiques entraîne aussi des défis plus importants pour le développement d’un traitement basé sur les laccases. En effet, il a été rapporté que les interactions entre les différents composés entraînaient des impactsallant d’une inhibition à une amélioration de l’élimination des micropolluants.Dans ce travail, nous nous intéressons aux mécanismes sous-jacents à la dégradation catalysée par des laccases de différents micropolluants lorsque ceux-ci sont les seuls micropolluants présents en solution. Les micropolluants étudiés sont le remazol brilliant blue R (un colorant anthraquinone), le bisphénol A (BPA, un composé qui intervient dans la production de polycarbonate et qui est suspecté d’être un perturbateur endocrinien) et le diclofénac (DCF, un anti-inflammatoire non-stéroïdien qui pause des problèmes d’écotoxicité). Ensuite, nous évaluons l’influence de la présence de deux composés en solution sur ces mécanismes en utilisant des mélanges binaires de BPA et DCF. Pour finir, lesmécanismes sous-jacents à la dégradation de BPA et DCF sont comparés lorsque deux sortes de laccases, présentant des potentiels redox différents, sont utilisées : des laccases de Trametes versicolor (0,80 V) et des laccases de Myceliophthora thermophila (0,46 V).