par Thomas, Nathalie ;Leybaert, Jacqueline
Référence Journée de la recherche en Fédération Wallonie-Bruxelles (25/11/2016)
Publication Non publié, 2016-11-25
Communication à un colloque
Résumé : Contexte. Les disparités sont grandes dans la maîtrise des prérequis à l'apprentissage de l'écrit, avec des conséquences importantes en terme d'alphabétisation et d'illettrisme : en 2009, près d’un quart des élèves de 15 ans en Communauté française de Belgique ne font pas preuve de compétences de base en lecture (Baye, Demonty, Lafontaine, Matoul, & Monseur, 2010). Les habiletés langagières et les habiletés d’éveil à l’écrit (connaissance du code et des conventions de lecture) sont de bons prédicteurs des capacités du langage écrit et peuvent être stimulées grâce à la lecture de livres « jeunesse » et des techniques de lecture interactive (Justice, 2007). Un retard de langage (Catts, Fey, Tomblin, & Zhang, 2002), un niveau socio-économique faible ainsi que le fait que la langue de l’école soit une seconde langue pour l’enfant sont des facteurs de risque pour l’apprentissage du langage écrit (Baye, 2010). La lecture interactive permet de transformer les séances de lecture en de véritables conversations, stimulant les interactions entre élèves et professeur et rendant l’enfant actif de ses apprentissages ; par ailleurs, c’est un moyen facile d’utilisation par les différents intervenants proches de l’enfant et qui a montré son efficacité aux États-Unis. Les cibles langagières, présentées de façon explicite lors des moments de lecture peuvent favoriser les premières acquisitions en langage écrit, par la stimulation du vocabulaire, de la compréhension du récit, de la conscience phonologique et de la connaissance des lettres (Justice & Kaderavek, 2004). Méthode. Nous avons choisi de travailler préventivement avec une population fragilisée sur les plans langagier et socio-économique, au sein de 8 écoles à discrimination positive du centre ville de Bruxelles. Un groupe expérimental (N=192 enfants, 10 classes) et un groupe contrôle (N=89 enfants, 9 classes), ont été constitués aléatoirement parmi les écoles s’étant montrées volontaires. Les institutrices du groupe expérimental ont proposé à leur classe 30 séances de lecture interactive sur une période de 3 mois, selon un programme structuré (3 séances par semaine) visant la stimulation du vocabulaire, de la compréhension du récit, de la conscience phonologique et des conventions de lecture. Préalablement à l’intervention, les institutrices ont reçu le programme sur support écrit (carnet reprenant le contexte d’intervention, l’explication des différents objectifs et la planification de ceux-ci) et ont été rencontrées pour une séance de questions-réponses. Le groupe contrôle ne bénéficie pas de l’intervention en lecture interactive. Les enfants ont été évalués individuellement en pré- et post-intervention au moyen d’épreuves langagières spécifiques (vocabulaire, morphosyntaxe, phonologie, conscience de l’écrit, conscience phonologique). Résultats. Les données mettent en évidence des différences significatives en post-intervention, à l’avantage du groupe expérimental, pour le vocabulaire, la morphosyntaxe, la conscience phonologique et la connaissance des lettres. L’amélioration du vocabulaire liée à l’intervention est particulièrement sensible chez les enfants qui présentent un retard de langage. Une tendance similaire est observée pour les épreuves de morphosyntaxe, de phonologie et de conscience de l’écrit. Conclusion. L’utilisation innovante de la lecture interactive dans les classes à discrimination positive du centre ville de Bruxelles semble avoir un effet positif chez les enfants en difficulté de langage. Elle leur permet d’améliorer leurs compétences langagières et de « rattraper » leurs pairs qui ne présentent pas de retard langagier. Perspectives. Il nous semble primordial de poursuivre nos recherches afin de préciser et d’étendre nos résultats. Nous nous interrogeons sur l’efficacité de l’intervention sur un groupe restreint de 5-10 enfants présentant un retard modéré à sévère de langage. Nous souhaiterions également réitérer les analyses après avoir pu former les institutrices sur une durée plus longue. Nous nous attendons à observer des effets plus importants si les enseignantes étaient davantage sensibilisées au programme et si elles avaient un meilleur contrôle de leurs objectifs.