par Devriese, Didier
Référence Les archives au XIXe siècle. Définitions et usages. (12-14 mars 2014: Paris (Université Paris Diderot))
Publication Non publié, 2013
Communication à un colloque
Résumé : Bouvard et Pécuchet, archivistes du « Manuel » de 1898 ? Le très fameux « Manuel » de 1898, alias l'ouvrage des Dr. S. Muller, Dr. J.-A Feith et Dr. R. Fruin, Manuel pour le classement et la description des archives1, paru en 1898, est uniformément considéré dans l'histoire de l'archivistique comme le premier manuel moderne. Célébré comme tel (Horsman, Ketelaar, Thomassen, 1998), désigné comme la « bible » des archivistes, fut-ce avec ironie (Walderhaug, 2012), il semble fonder l'archivistique moderne (Cook, 1997, Devriese, 2004). Ketelaar défend même l'idée selon laquelle les qualités techniques du « Manuel » sont telles qu'elles inhibent pour des décennies la réflexionthéorique en archive (Ketelaar, 2003). Henri Pirenne lui-même le décrit, dans l'introduction à l'édition en langue française, « comme le type achevé du manuel de l'archiviste »2. Mais ce terme d'« achevé » ne sonne-t-il pas ici comme le XIXe siècle finissant, fut-ce en1910 ? Car la question se pose de savoir si le premier manuel, qui fonde la modernité archivistique, ou du moins son historiographie, n'est pas plutôt celui qui clôt un cycle d'un autre ordre ? Conçu comme un manuel technique, mettant à l'honneur des principes « intangibles » de la pratique des archives coulés en théorie (provenance, intégrité, ordre original etc.), il célèbre en fait la consubstantialité des archives et de la méthode historique (Duchein, 1998 ; Devriese, 2002, 2006) ou encore de l'archivistique et du Droit naturel. En ce sens, si le « Manuel » semble le produit de la modernité, incarnée ici par le mariage du positivisme légaliste et de l'histoire néo-scientiste, il nous dit tout autant l'apogée des archives mise au service de l'histoire de l'identité nationale.