Résumé : Les chengyu, expressions idiomatiques spécifiques du chinois mandarin, forment l’une des pierres angulaires de la phraséologie de cette langue. Leur lourd bagage historique et leur forte prégnance stylistique en font certainement l’un des aspects les plus intéressants et les plus riches du chinois, mais aussi l’un des plus difficiles à maitriser pour les apprenants et les traducteurs de la langue de Confucius. La présente thèse, menée en cotutelle, se veut une exploration des chengyu et de leurs perspectives traductologiques. Notre travail se déroule en deux phases majeures : l’une consacrée à une analyse phraséologique et l’autre consistant en une plongée dans la critique des traductions.Constatant le faible nombre d’études occidentales sur ces expressions idiomatiques, nous effectuerons tout d’abord une brève présentation linguistique dans le but d’en dégager des critères définitoires, sinon archétypaux. Nous montrerons combien cette tâche se révèle difficile, vu le manque de consensus entre les spécialistes — en particulier sinophones. Nous proposerons d’examiner les chengyu à travers le prisme de la tradition phraséologique occidentale, dont nous détaillerons le potentiel mais aussi les limites. Le sujet de notre travail n’étant pas de trancher pour de bon la délicate question de la définition et de la démarcation précise des chengyu, nous lancerons toutefois quelques pistes qui seront autant de critères que nous éprouverons dans la deuxième phase de la thèse.Celle-ci tourne le dos à la linguistique pour embrasser pleinement la voie de la traductologie, puisque nous tenterons d’élaborer un modèle pour la critique de la traduction des chengyu. Après un bref état de l’art sur la discipline en Occident et en Chine, nous détaillerons la procédure que nous suivrons pour évaluer le plus objectivement possible, sans jugement de valeur, les éventuels effets que pourrait avoir la traduction des chengyu dans l’interprétation de quatre romans chinois contemporains par des lecteurs cibles francophones. L’examen se découpe en quatre étapes: présentation macroscopique générale, analyse macroscopique statistique, analyse microscopique qualitative et conclusions macroscopiques. Le cœur de la critique se concentre sur la polyphonie textuelle et sur la multiplicité des chemins interprétatifs contenus dans les chengyu, ainsi que sur les effets traductifs qui peuvent les toucher.Les résultats de cette enquête montrent que, dans notre corpus de quatre romans, les différentes techniques mises en œuvre pour traduire les chengyu n’altèrent en rien l’interprétation des textes originaux par les lecteurs cibles. La conclusion de la thèse ouvre la possibilité d’étendre le même type de critique à d’autres phrasèmes du chinois.