Résumé : A l'approche de l'élargissement de l'UE de 2004, les Etats membres de l'Union européenne ont adopté des dispositions transitoires à la libre circulation des travailleurs, à savoir une période dérogatoire de sept ans durant laquelle ils pouvaient continuer à appliquer leur législation relative aux permis de travail. Initialement isolée, l'Allemagne est parvenue en quelques années à imposer sa préférence à ce sujet à l'ensemble de l'Union européenne. Cette thèse fait trois constats. Le premier est que si la libre circulation des travailleurs se situe à l'intersection des politiques d'élargissement, de marché du travail et de politique migratoire, c'est la composante migratoire qui a dominé la prise de décision. Plus précisément, les dispositions transitoires étaient perçues comme un outil de migration sélective afin de choisir les profils jugés comme étant les plus désirables - et ce même si les désirs politiques ne correspondaient pas à la réalité du marché. La seconde est qu'il n'y a eu que très peu d'Européanisation et d'harmonisation dans ce processus de décision, les Etats membres dominant les négociations. Enfin, le troisième constat est que les acteurs politiques ont principalement pris en compte des considérations électorales, et non des considérations économiques, dans l'adoption de ces dispositions transitoires.