Résumé : Cette thèse identifie et analyse les revendications de légitimité des organisations régionales de sécurité par rapport à leurs actions et leur existence en tant que sites d’autorité relativement nouveaux. En effet, la recherche explore le contexte normatif qui sert de base au régionalisme sécuritaire entre le niveau global et le niveau national. A cet égard, la thèse propose un cadre conceptuel et théorique pour l’étude de l’autolégitimation qui est ici conçue comme un processus social dynamique et intersubjectif de justification du droit de gouverner. Ce cadre théorique combine les littératures sur la sécurité, le régionalisme, et la légitimité politique. Son objectif principal est l'identification des arguments de légitimation qui peuvent justifier des relations de pouvoir inégales entre gouvernants et gouvernés. Les études de cas de cette thèse sont les missions de sécurité et les politiques de gestion de crise de l'Union Africaine et de l'Union Européenne en réponse à la crise au Darfour (2003-) et les zones adjacentes, telles que le Tchad et la République Centrafricaine. A partir du concept d’autolégitimation et de l'analyse des documents produits par les deux organisations régionales, la partie empirique identifie quatre modes principaux de légitimation qui sont appelés « images du régionalisme sécuritaire ». Ces images sont le régionalisme bénéfique, le régionalisme nécessaire, le régionalisme inévitable, et le régionalisme multilatéral. Les images du régionalisme sécuritaire montrent que la légitimation des politiques et des actions, d'une part, et la légitimation des organisations régionales et de leur position au sein de la gouvernance de la sécurité, d’autre part, sont indissociables. En outre, elles révèlent également que, plus que la légitimation des actions, c’est souvent la légitimation de l'inaction qui est cruciale pour le rôle de ces organisations en tant qu’acteurs de sécurité. Enfin, les arguments de légitimation faisant référence au caractère multilatéral et collectif des actions entreprises par ces organisations régionales démontrent une tendance vers leur reconnaissance mutuelle et, par conséquent, contribuent à leur légitimation.
This thesis identifies and analyses the legitimacy claims of regional security organizations in relation to their policies and their existence as relatively new sites of authority. Hence, it explores the normative context underpinning security regionalism between global and national levels. In this regard, it proposes a conceptual and theoretical framework for the study of self- legitimation, which is understood as a dynamic and intersubjective social process of justification of the right to rule. This framework is based on the intersection between the literatures on security, regionalism, and political legitimacy. Its main focus is the identification of the arguments of legitimation that can justify the unequal power relations between rulers and ruled. This thesis’ case studies are the security missions and policies of crisis management of the African Union and the European Union in response to the crisis in Darfur (2003-) and adjacent areas such as Chad and Central African Republic. Building on the framework of self-legitimation and on the analysis of documents produced by both regional organizations, the empirical part identifies fours large patterns of arguments, which are called ‘images of security regionalism’. These images are the beneficial regionalism, the necessary regionalism, the inevitable regionalism, and the multilateral regionalism. The images of security regionalism show that the legitimation of policies and actions, on the one hand, and the legitimation of regional organizations and their positions within security governance, on the other, are indissociable. Moreover, they also reveal that, more than the legitimation of actions, it is often the legitimation of the perceived inaction that is crucial to the organizations’ role as a security actors. Finally, the patterns of arguments referring to the inter-organizational relations and to the multilateral and collective character of the organizations’ policies point to a trend of mutual recognition and, by consequence, mutual legitimation among regional organizations.