Président du jury Parmentier, Marc
Promoteur Mascart, Françoise
Publication Non publié, 2004-12-17
Résumé : | La tuberculose demeure un problème majeur de santé publique. Mycobacterium tuberculosis infecte un tiers de la population mondiale et environ 3 millions de décès, des suites de l’infection, sont recensés chaque année dans le monde. La mise au point d’une stratégie vaccinale efficace constitue dès lors la solution idéale pour tenter d’éradiquer la bactérie. Le système immunitaire humain répond à l’infection par l’induction d’une réponse cellulaire, caractérisée essentiellement par la sécrétion de médiateurs pro-inflammatoires, comme l’interféron-gamma (IFN-?). A la fois les lymphocytes T CD4+ et T CD8+ produisent cette cytokine, mais les seconds sont également doués de propriétés cytotoxiques, entraînant la mort de la cellule infectée et du bacille. L’évaluation du potentiel de nouveaux candidats vaccins implique dès lors la caractérisation exhaustive de la réponse immunitaire induite. La « heparin-binding hemagglutinin (HBHA) » est une protéine de 28-kDa, sécrétée et exprimée à la surface de M. tuberculosis et de M. bovis BCG. Montrant une affinité importante pour les gycoconjugués sulfatés, elle favorise la dissémination hématogène du bacille de Koch. Nos résultats démontrent que la HBHA stimule l’immunité à médiation cellulaire humaine avec, toutefois, des différences selon que le sujet infecté souffre ou non de tuberculose active. En effet, les cellules mononuclées circulantes, de la majorité des individus infectés mais non-malades, secrètent de l’IFN-? en réponse à la HBHA, alors qu’une minorité de sujets malades produit de faibles quantités d’IFN-?, après stimulation in vitro avec l’antigène. Lors de l’infection naturelle par le bacille de Koch, la HBHA devient dès lors une cible pour le système immunitaire, et plus particulièrement au sein des sujets, généralement considérés, comme protégés. L’analyse de la réponse cellulaire, spécifique à l’adhésine, démontre que les lymphocytes T CD4+, mais également T CD8+, des sujets infectés mais non-malades, produisent de l’IFN-?. L’antigène est effectivement présenté aux lymphocytes T grâce aux glycoprotéines du complexe majeur d’histocompatibilité de classe I et de classe II. Le phénotypage des cellules productrices d’IFN-? témoigne également la participation des cellules « natural killer (NK) » dans la réponse immunitaire contre la HBHA. En l’absence des lymphocytes T restreints à l’antigène, les cellules NK se montrent toutefois incapables de secréter de l’IFN-?, au contact de la HBHA. Les interactions entre les lymphocytes T, spécifiques à l’antigène, déterminent également la production de cytokines. Alors que la déplétion des cellules T CD8+ diminue légèrement la production d’IFN-?, l’absence des lymphocytes T CD4+ abolit toute sécrétion résiduelle d’IFN-?, lors de la stimulation avec la HBHA. Par contre, les lymphocytes T CD8+, pré-stimulés avec l’antigène en présence de cellules T CD4+, répondent secondairement à la présentation de la HBHA par des macrophages. Ce résultat suggère une coopération entre ces deux sous-populations cellulaires, afin de produire de l’IFN-? à l’encontre de la HBHA. Grâce à un contact cellulaire, les lymphocytes T CD4+ spécifiques à la HBHA soutiennent effectivement l’activation des cellules T CD8+. Outre la production de cytokines, la participation des lymphocytes T CD8+ à la lutte contre M. tuberculosis, se traduit également par leurs fonctions cytotoxique et bactéricide. La caractérisation des cellules T CD8+, spécifiques à la HBHA, s’est dès lors poursuivie par l’évaluation de leur potentiel cytolytique. Après expansion clonale, les lymphocytes T CD8+ induisent la mort des macrophages présentant la HBHA. Le mécanisme cytotoxique engage la libération du contenu des granules cytoplasmiques, comme le montre l’augmentation de la synthèse de perforine et de granzyme A, lorsque les cellules T CD8+ sont stimulées avec la HBHA. Privés de ces médiateurs solubles, les lymphocytes T CD8+, spécifiques à la HBHA sont alors incapables de lyser les cellules cibles. En définitive, l’activité microbicide constitue actuellement le meilleur corrélat de protection. La culture de macrophages infectés par M. bovis BCG, en présence de cellules T CD8+ spécifiques à la HBHA, limite partiellement la croissance de la bactérie phagocytée, soulignant le pouvoir anti-mycobactérien de l’immunité cellulaire induite par la HBHA, chez le sujet infecté mais non-malade. D’autre part, l’analyse biochimique, menée à l’Institut Pasteur de Lille, démontre que la HBHA subit une modification post-traductionnelle, lors de sa synthèse. Il s’agit d’une méthylation des multiples résidus lysine, qui composent son extrémité C-terminale. La comparaison des formes native méthylée et recombinante non-méthylée de la HBHA démontre que la méthylation détermine l’immunogénicité et le pouvoir protecteur de la HBHA. En effet, contrairement à la HBHA native, la forme recombinante stimule faiblement la production d’IFN-?, chez les individus infectés mais non-malades, et ne protège pas la souris contre l’infection par le bacille de Koch. La sécrétion d’IFN-? est, par ailleurs, partiellement restaurée lorsque la HBHA est artificiellement méthylée in vitro. Les splénocytes murins se comportent également différemment, selon qu’ils ont été immunisés avec la forme méthylée ou non. Alors que la HBHA recombinante est immunogène chez la souris et chez l’homme, l’immunité cellulaire murine induite demeure impassible face à l’infection des phagocytes par les mycobactéries, ce qui se traduit par l’absence de protection. En conclusion, la HBHA se compose d’épitopes protecteurs, qui dépendent de la présence des groupements méthyls, associés à son domaine C-terminal. Il s’agit, à notre connaissance, de la première mise en évidence de l’implication de la méthylation dans la réponse d’immunité cellulaire à l’encontre d’une protéine. De plus, l’immunité adaptative spécifique à la HBHA, chez le sujet infecté mais non-malade, se caractérise par les trois principaux corrélats de protection, actuellement décrits chez l’homme. Le potentiel vaccinal de cette adhésine mycobactérienne est donc bien réel. |