Résumé : L’agriculture est un secteur d’activité privilégié pour notre objet qui est l’étude de la dynamique sociotechnique et du travail. Nous montrons dans cette étude comment des éleveurs transformés de plus en plus en agro-pasteurs, à la suite de la sécheresse et la surcharge des hommes et du cheptel sur les ressources naturelles des parcours collectifs, sont amenés à changer progressivement leurs systèmes de production et partant leurs rapports sociaux.

Au-delà d’une vision figée et homogénéisante de la paysannerie véhiculée par certains modèles sociologiques et par la vulgarisation agricole au Maroc, nous mettons l’accent sur l’hétérogénéité de la paysannerie et les aspects dynamiques de l’activité agricole et de ses acteurs.

Bien que les éleveurs/agriculteurs évoluent dans un environnement physique et économique souvent défavorable à leurs activités, ils manifestent de différentes stratégies pour améliorer leurs conditions de vie ou renforcer leurs acquis.

A partir d’une étude sur le terrain rurale de la Commune de Ben Smim, au Moyen Atlas berbère marocain et ayant mobilisé différents instruments de recueil d’informations, nous avons relevé que l’activité agricole n’est pas simplement une activité de production mais aussi de repositionnement des acteurs dans le système social. L’ethnique, le social et le politique se mêlent dans l’orientation des rapports de production. C’est pourquoi il est difficile d’isoler une pratique agricole des autres pratiques qui lui sont intimement liées et qui peuvent concerner d’autres domaines de vie des agriculteurs.

Avec la crise du nomadisme, les éleveurs/agriculteurs se fixent dans les douars ou les villages et élargissent ainsi leurs réseaux sociaux et professionnels. Ils deviennent ainsi de plus en plus perméables aux innovations techniques et organisationnelles et améliorent la performance de leurs troupeaux, introduisent de nouvelles cultures de marché et diversifient leurs stratégies de vente. Les minorités du point de vue ethnique et économique, d’intégration dans le système social local, les notables sont à même d’apporter de nouvelles variantes à leurs systèmes de production.

En fin de compte, chacun, en fonction de sa situation et de son projet, participe à la dynamique socio-technique locale.