Résumé : La plupart des molécules utilisées en chimiothérapie conventionnelle, bien qu’ayant des cibles moléculaires différentes, induisent dans la majorité des cas une mort cellulaire par apoptose. Or, de plus en plus de chimiorésistances se rencontrent au niveau des cellules cancéreuses vis-à-vis de ce type de molécules. Face à cette situation il devient urgent de trouver des molécules ayant des mécanismes d’action différents et capables de court-circuiter spécifiquement les mécanismes de résistance des cellules cancéreuses.

La stratégie mise en place lors de ce travail a été de partir d’une molécule naturelle issue d’un extrait de la racine de Glycyrrhiza glabra qui présentait déjà une activité anti tumorale marquée. L’intérêt du travail a été de dériver l’acide 18β-glycyrrhétinique de manière originale afin de potentialiser son effet anticancéreux, notamment vis-à-vis de huit lignées cellulaires présentant des résistances plus ou moins marquées aux stimuli pro-apoptotiques. Ainsi après avoir caractérisé la pureté et la stabilité de cette série de nouvelles molécules, nous avons retenu les dérivés les plus intéressants en termes d’inhibition in vitro de la prolifération cellulaire. Sur base de ce premier choix, nous avons investigué des cibles spécifiques décrites dans la littérature pour les hémidérivés de l’acide 18β-glycyrrhétinique : le protéasome 26S et le récepteur nucléaire PPARγ. Cette étude nous a permis de retenir un dérivé en particulier capable d’inhiber à 50% les trois sites catalytiques du protéasome sans toutefois inhiber PPARγ : le N-(2-{3-[3,5-bis(trifluoromethyl)phenyl]ureido}ethyl)-glycyrrhetinamide (6b). Nous avons ensuite évalué ce composé sur un ensemble de 333 kinases afin de déterminer un profil antitumoral plus large pour ce type de molécule.

Le profil pharmacologique in vitro de ce dérivé de l’acide 18β-glycyrrhétinique nous a amenés à étudier son comportement in vivo chez la souris saine. A cette fin, une étude de préformulation nous a permis de définir une formulation galénique optimale pour ce composé, la nanoémulsion qui a servi à déterminer une dose maximale tolérée (indice DMT) par la souris saine. Nous avons ensuite travaillé à une dose non toxique pour déterminer le profil pharmacocinétique plasmatique chez la souris saine, par voie d’administration intraveineuse et par voie orale.

Les conclusions de cette étude nous montrent que le dérivé de l’acide 18β-glycyrrhétinique que nous avons mis au point présente de remarquables caractéristiques pharmacologiques in vitro et un comportement in vivo proche de la molécule naturelle. Des études d’activité in vivo devraient débuter prochainement.