Résumé : Les fourmis ont développé des mécanismes physiologiques, comportementaux, organisationnels et coopératifs, agissant à l’échelle coloniale et réduisant l’exposition ainsi que les effets néfastes des agents infectieux. Ces protections coloniales sont regroupées sous le terme d’immunité sociale (Cremer et al. 2007). La résistance est l’une des stratégies de défense de la colonie contre les pathogènes, elle comprend l’ensemble des comportements visant à réduire activement la charge en agents infectieux et leur transmission au sein de la population. La présence de cadavres au sein du nid constitue un risque sanitaire important pour la colonie, leur gestion est donc un élément primordial de la défense immunitaire coloniale.Dans ce mémoire, nous avons étudié la manipulation et le rejet de cadavres, contaminés par Beauveria bassiana ou non, par les ouvrières de la fourmi Myrmica rubra. A cet effet, nous avons comparé les dynamiques de rejet des cadavres selon le risque sanitaire qu’ils représentent. Nous avons également évalué si l’appartenance à un groupe fonctionnel et la mobilité des individus influencent leur propension à manipuler et rejeter les cadavres « sains » et sporulants.Nos résultats nous indiquent que les ouvrières différencient les cadavres non contaminés de ceux recouverts de conidies : elles interagissent significativement moins avec ces derniers et les rejettent plus rapidement. De plus, l’implication des ouvrières dans la gestion des cadavres diffère selon leur caste fonctionnelle ainsi que le degré de contamination des cadavres. Les groupes des nourrices et des domestiques sont les acteurs principaux de la manipulation et du rejet des déchets contaminés. La mobilité des individus au sein du nid influence positivement la probabilité d’entrer en contact avec les cadavres ainsi que la propension à manipuler un corps non contaminé. Enfin, les groupes responsables de l’éjection des cadavres sporulants sont également les plus mobiles au sein du nid. La mobilité d’un individu influence donc sa probabilité d’entrer en contact avec un cadavre, cependant elle n’influence pas sa propension à manipuler un cadavre contaminé.Pour conclure, nous soulignons l’importance de pouvoir lier les profils comportementaux des groupes fonctionnels à leurs préférences spatiales, afin de rendre compte de leurs investissements par rapport à la gestion des déchets et singulièrement dans le rejet de cadavres contaminés.