Résumé : L’étude de l’institutionnalisation des œuvres d’art brut par leur exposition muséale permet d’analyser les processus qui font d’œuvres en marge du circuit officiel de l’art des objets de musée, c’est-à-dire des témoins de l’être humain et de son environnement. Ce mémoire pluridisciplinaire définit trois étapes majeures à l’institutionnalisation : la première est l’identification du sens muséal des œuvres d’art brut, par les discours textuels de l’exposition, à travers la création et la transmission d’un savoir aux publics. La seconde étape est la mise en valeur muséale des œuvres, par les discours spatiaux de l’exposition, pour qu’elles puissent être appréciées par les publics. Enfin, la troisième étape de l’institutionnalisation est l’acquisition pour les œuvres d’art brut du statut d’héritage culturel, à travers le discours muséologique des expositions.En 2019-2020, dans la Région de Bruxelles-Capitale, trois expositions d’art brut ont eu lieu dans des institutions muséales aux entités juridiques diverses. L’analyse de leurs discours principaux révèle que les enjeux et effets de l’institutionnalisation des œuvres d’art brut dépendent des identités des institutions et mobilisent des sens, valeurs et statuts propres aux œuvres d’art brut. La recherche est enrichie d’entretiens avec des professionnel·les impliqué·es dans la conceptualisation et la gestion des projets des expositions, mais aussi de réflexions théoriques sur la muséographie, la scénographie et la muséologie contemporaines, étoffées de points historiques concernant l’exposition d’art brut. Cette étude dresse finalement une typologie de ce qu’est aujourd’hui une institution muséale dans la Région de Bruxelles-Capitale à travers l’exposition d’œuvres d’art brut qui induit notamment une évolution de la notion d’inaliénabilité de l’héritage culturel et de la permanence de l’institution elle-même. L’institutionnalisation des œuvres d’art brut est finalement au cœur de problématiques de gestion culturelle et représente un véritable enjeu de pouvoir.