Résumé : La permaculture et l’agroécologie ont toutes deux émergé au sein d’un contexte global de contestation des impacts de la Révolution Verte et de la modernisation de l’agriculture. Bien que ces deux concepts possèdent des caractéristiques communes, plusieurs aspects les différencient fortement. Au sein de cette étude, nous avons tenté de clarifier ces différences et de dresser un aperçu des consensus et dissensus entre les porteurs des deux concepts. Pour ce faire, nous avons choisi d’analyser les différentes perceptions de la permaculture, et de son éventuelle participation à la transition agroécologique, dans un réseau d’agroécologues. Au sein de la littérature scientifique, les rapports entre les permaculteurs et la recherche scientifique ont particulièrement fait l’objet de discussions. La contribution de la permaculture à la transition agroécologique est alors perçue comme limitée, notamment à cause de son isolement vis-à-vis de la science. Toutefois, le concept est parfois considéré comme la forme d'agroécologie la plus largement pratiquée et son potentiel de mobilisation populaire est souligné. De la même manière, l’intérêt de ses spécificités, telles que la notion de design des agroécosystèmes, est reconnu. A la suite de cette revue de la littérature et des entretiens exploratoires que nous avons effectués, nous avons choisi d’utiliser la méthodologie Q afin d’interroger et analyser les perceptions de la permaculture au sein d’un échantillon d’agroécologues. Bien que nous ayons souligné l’existence de plusieurs limites relatives à notre étude, l’analyse statistique de nos résultats et les échanges avec les participants nous ont tout de même permis de regrouper les différentes perceptions en trois groupes significatifs. Les “inclusifs“, les “fédérateurs“ et les “sceptiques“ représentent alors les trois profils de perception identifiés au sein de notre échantillon. L’étude des consensus et dissensus entre ces groupes nous a permis de formuler plusieurs pistes d’évolution de l’efficacité de la participation de la permaculture à la transition agroécologique. La démonstration scientifique de ses différents rendements, une plus grande prise en compte des réalités de travail des agriculteurs par les permaculteurs, et une plus grande ouverture de ces derniers au secteur scientifique permettraient donc de mettre plus à profit les spécificités du modèle permacole, dont la richesse et les perspectives de recherches qu’elles offrent sont soulignées par les agroécologues.Les résultats obtenus nous amènent à recommander la réalisation de nouvelles études sur ce sujet. Soumettre une étude de la sorte à un échantillon plus large et diversifié d’agroécologues, ou en se focalisant sur les perceptions que les permaculteurs ont de l’agroécologie devrait permettre de penser plus efficacement l’articulation de ces deux concepts. Selon nous, cela irait dans le sens de l’objectif général commun aux deux modèles : la proposition d’une alternative positive et soutenable au modèle conventionnel de production agricole, dont les limites et différents impacts ont été démontrés.