Résumé : Les envenimations par morsure de serpents constituent un problème de santé publique au Burkina Faso. Leur prise en charge s’effectue à la fois au niveau du système de santé conventionnel et au sein des communautés locales à travers les tradipraticiens de santé (TPS). L'objectif de cette thèse était d’explorer les pratiques thérapeutiques traditionnelles relatives au traitement des envenimations par morsure de serpent, et à en évaluer les fondements scientifiques. La stratégie utilisée en premier lieu a été la réalisation d'une enquête ethnobotanique dont l'un des principaux résultats a été la mise en évidence de l'utilisation de recettes partiellement calcinées pour la prise en charge des envenimations ophidiennes. Partant des résultats de cette enquête, nous avons, dans un second temps entrepris de déterminer le pouvoir adsorbant de ces recettes partiellement calcinées vis-à-vis des protéines/peptides des venins de serpents. Le charbon actif ainsi qu’une des recettes locales collectées ont présenté des capacités d'adsorption notable à cette étape. Nous avons par la suite, évaluer l’effet cyto-protecteur de ce phénomène d’adsorption vis-à-vis de la cytotoxicité des venins de serpent. Ainsi, des tests de viabilité cellulaire (MTT) sur des lignées de kératinocytes humains immortalisés ont permis d’apprécier leurs effets protecteurs face à la cytotoxicité induite par les venins. Le charbon actif et une recette locale ont montré une activité protectrice notable, contrairement à la recette de Lalgaye qui, soit avait peu d’effet soit accentuait la toxicité cellulaire. Au regard de la nature partiellement calcinée des recettes, nous avons réalisé une caractérisation phytochimique à travers le profil métabolique de ces recettes, à la recherche de composés organiques d'origine végétale résiduels. Pour ce faire, les recettes ont subi une extraction à l'aide d'hexane, de méthanol et d'eau. Les extraits ont été analysés par LC-HRMSMS et les bases des données consultées, nous ont permis d’identifier des composés organiques appartenant à la famille des terpénoïdes et des flavonoïdes dans les recettes partiellement calcinées mais à des niveaux d'abondance inférieurs à ceux obtenus dans une recette non calcinée. Il est à noter que des composés organiques d'origine synthétique tels que de pesticides ont également été détectés dans les recettes étudiées. Au vu des résultats obtenus et du rôle prépondérant que joue la médecine traditionnelle dans la prise en charge des envenimations par morsure de serpent au Burkina Faso, il apparaît essentiel que le Ministère de la Santé mette en œuvre des initiatives de sensibilisation ciblées à l’attention des tradipraticiens de santé (TPS). Ces actions devraient porter sur les conséquences pharmacologiques et sanitaires de la calcination du matériel végétal utilisé dans les préparations thérapeutiques, ainsi que sur les risques de contamination des recettes traditionnelles par des substances chimiques, notamment les résidus de pesticides.