Thèse de doctorat
Résumé : La fibrose est un phénomène par lequel du tissu normal est remplacé par du tissu conjonctif, entrainant une perte de fonction. Tous les organes peuvent être atteints et de nombreuses causes existent. Il existe notamment un lien fort entre l'inflammation, qu'elle soit aigue ou chronique, et le développement de fibrose. Au niveau des poumons, les pneumopathies interstitielles diffuses (PID) correspondent à un groupe de maladies caractérisées par un mix variable d'inflammation et de fibrose de l'interstitium pulmonaire, résultant en une altération des échanges gazeux et à une insuffisance respiratoire.La chémérine est un agent chimioattractant atypique dont le principal récepteur est CMKLR1, aussi appelé ChemR23. Il a été précédemment démontré dans deux modèles d'inflammation pulmonaire, un modèle de détresse respiratoire aiguë induit par le lipopolysaccharide bactérien et un modèle de pneumonie virale sévère, que le système chémérine/CMKLR1 présentait des propriétés anti-inflammatoires. Son rôle dans la fibrose, et en particulier dans la fibrose pulmonaire, a quant à lui été peu étudié et des résultats contradictoires ont été observés.Nous avons débuté ce projet en évaluant le système chémérine/CMKLR1 chez les patients avec une infection à SARS-CoV-2 en voulant identifier un potentiel rôle pronostic. Nous avons pu démontrer que la concentration plasmatique de chémérine était augmentée chez les patients avec une infection sévère et associée avec le risque de décès et l'inflammation. De plus, des niveaux plasmatiques de chémérine supérieurs à 291.4 ng/mL au jour 14 d'hospitalisation pouvaient prédire le risque de décès avec une sensibilité de 77.8% et une spécificité de 88.1%. Nous avons également identifié un marquage de chémérine dans les fibroblastes/myofibroblastes présents dans les lésions de fibrose débutantes chez des patients COVID-19 autopsiés, suggérant un possible rôle de la chémérine dans la physiopathologie des lésions fibrotiques post-COVID-19.Nous avons par la suite continué d'étudier le rôle du système chémérine/CMKLR1 dans la physiopathologie de la fibrose pulmonaire. Il y a de nombreuses causes de fibrose pulmonaire mais une des plus sérieuses est la fibrose pulmonaire idiopathique (FPI), une maladie chronique, progressive et irréversible. Nous avons observé que les patients FPI présentaient des niveaux plus élevés de chémérine dans le plasma et le lavage bronchoalvéolaire. Nous avons aussi montré que les concentrations de chémérine dans le LBA augmentaient durant les phases inflammatoires et au début de la fibrogenèse dans le modèle bléomycine, suggérant à nouveau une implication dans le lien entre inflammation et fibrose. De plus, les souris inactivées pour la chémérine développaient moins de fibrose que les souris sauvages traitées à la bléomycine. Nous avons montré que c'était lié à une diminution de la concentration de FAPα dans le LBA et à un recrutement moindre de macrophages alvéolaires dérivés des monocytes. Nous avons aussi étudié un antagoniste de CMKLR1, α-NETA, dans le modèle bléomycine, et observé une diminution significative des niveaux de FAPα dans le LBA des souris traitées. Ceci suggère que le système chémérine/CMKLR1 pourrait être une potentielle cible thérapeutique pour prévenir le développement de la fibrose pulmonaire.Un autre thème de ma thèse a été d'évaluer la protéine d'activation des fibroblastes (FAPα) comme nouveau biomarqueur de fibrogenèse. En effet, de nombreux outils pour évaluer l'extension de la fibrose sont disponibles mais aucun ne renseigne sur l'activité intrinsèque de celle-ci. FAPα est exprimée par les fibroblastes activés et peut être sélectivement identifiée par PET/CT par des inhibiteurs (FAPI) couplés à un isotope. Nous avons donc évalué la captation de [18F]FAPI-74 dans le modèle murin de fibrose pulmonaire induit par la bléomycine et avons observé une captation spécifique du traceur dans les phases de fibrogenèse active. De plus, nous avons démontré que la mesure de FAPα dans les LBA était spécifique de la fibrogenèse précoce et fortement associée avec la sévérité de celle-ci. La concentration de FAPα dans le LBA de patients avec FPI était également augmentée par rapport à celle de patients contrôles et d'autant plus chez les patients FPI avec un phénotype progresseur.En conclusion, nos résultats montrent qu'en plus d'être impliquée dans l'inflammation pulmonaire, la chémérine présente des propriétés profibrotiques dans un modèle de fibrose pulmonaire. Notre travail a mis en évidence de possibles mécanismes médiant ces effets, ouvrant la voie à de nouvelles études et l'évaluation du système chémérine/CMKLR1 comme potentiel traitement préventif pour la fibrose pulmonaire, indépendamment de sa cause. Nous avons également développé un nouveau biomarqueur de fibrogenèse, qui pourrait être utile tant dans des modèles précliniques de fibrose pulmonaire que pour la mise au point initiale des patients avec FPI, voir avec d'autres types de fibrose pulmonaire.
Fibrosis is a general term, referring to a replacement of normal tissue by conjonctive tissue, resulting in functional defect. All organs may be affected and etiologies are various. It is well known that there is a strong link between inflammation, whether acute or chronic, and fibrosis development. In particular, in the lungs, interstitial lung diseases (ILD) are a wide group of pathologies of the pulmonary interstitium characterized by inflammation, fibrosis, or a combination of both, leading to alteration of gas exchanges and progressively to respiratory failure.Chemerin is an atypical chemoattractant agent, mediating its properties mainly through the chemokine like receptor 1 (CMKLR1) also named ChemR23. It was previously demonstrated by our research group in a model of acute lung injury induced by bacterial lipopolysaccharide and a model of severe viral pneumonia caused by the pneumonia virus of mice, that the chemerin/CMKLR1 system displayed anti-inflammatory properties in the lung. The role of chemerin in fibrosis and in particular lung fibrosis has been poorly investigated and contradictory results were observed.We started this project by evaluating the chemerin/CMKLR1 system in COVID-19 patients to highlight a possible prognostic role. We demonstrated that chemerin plasma levels were increased in severe COVID-19 patients and were associated with risk of death. Accordingly, chemerin plasma concentrations higher than 291.4 ng/mL at day 14 of hospitalization predicted the risk of death with a sensitivity of 77.8% and a specificity of 88.1%. Interestingly, we observed a chemerin staining in fibroblasts/myofibroblasts from lesions of advanced diffuse alveolar damage on lung slides from autopsied COVID-19 patients, suggesting a possible role of chemerin in COVID-19 associated pulmonary fibrosis.Therefore, we decided to further assess the role of the chemerin/CMKLR1 axis in lung fibrosis. There are many causes of pulmonary fibrosis, but one of the most serious is idiopathic pulmonary fibrosis (IPF), a chronic, progressive and irreversible disease. We observed that IPF patients presented higher chemerin plasma and bronchoalveolar lavage fluid (BALF) levels compared to controls. Moreover, we showed that chemerin BALF levels increased in mice treated with bleomycin (a mouse model of lung fibrosis) during both the inflammatory phase and fibrogenesis, suggesting an involvement in the link between inflammation and fibrosis. Moreover, we performed experiments using chemerin knock-out (ChemKO) mice. Upon bleomycin treatment, ChemKO mice developed less fibrosis than their wild-type (WT) counterparts. This effect was due to a decreased fibrogenesis and a lower recruitment of monocyte-derived alveolar macrophages. We also evaluated the effect of an antagonist of CMKLR1, α-NETA, in the bleomycin model and observed significantly reduced fibrogenesis in the treated mice as compared to placebo. Overall, our results suggest that the chemerin/CMKLR1 system could be a potential therapeutic target to prevent pulmonary fibrosis.Another topic of my thesis was to evaluate the potential role of the fibroblast activation protein alpha (FAPα) as a new biomarker of fibrogenesis. Indeed, several tools to assess the extent of fibrosis are available but none to evaluate the intrinsic activity of fibrosis. FAPα is a marker of activated fibroblasts and can be selectively targeted by inhibitors (FAPI) coupled to an isotope, and thus identified by PET/CT. We assessed the uptake of [18F]FAPI-74 in the bleomycin lung fibrosis model and observed a specific uptake during fibrogenesis phases. Moreover, we demonstrated that increased levels of FAPα levels BALF are observed specifically during fibrogenesis. Furthermore, we showed that the levels of FAPα were strongly associated with fibrotic score. FAPα BALF levels were also increased in patients with idiopathic pulmonary fibrosis (IPF) compared to controls and even more in IPF patients with a progressive phenotype.In conclusion, our results show that, in addition to be involved in lung inflammation, chemerin displays profibrotic properties in a model of lung fibrosis. Our work highlighted some possible mechanisms mediating its effects, paving the way for further studies and its evaluation as a potential preventive treatment for pulmonary fibrosis of various causes. We also developed a new biomarker of fibrogenesis, which could be helpful both in preclinical models of lung fibrosis and for the initial assessment of patients with IPF and possibly other causes of pulmonary fibrosis.