Résumé : La susceptibilité accrue des nouveau-nés face aux infections a longtemps laissé penser que ceux-ci étaient « immunodéprimés » comparés aux adultes. Néanmoins, une nouvelle définition du système immunitaire néonatale a mis en lumière que celui-ci est en cohésion avec les besoins physiologiques du début de vie. Ainsi, réduire les réactions allo-immunes de la mère et accepter la colonisation microbienne sont chez les nouveau-nés en adéquation avec leur sensibilité accrue aux infections et la faiblesse de certaines de leurs réponses vaccinales. Depuis quelques années, un lien entre la colonisation du microbiote et le développement du système immunitaire a été mis en évidence. Cependant, les mécanismes de ces interactions chez le nouveau-né sont très peu définis. Le but de cette thèse de doctorat était donc de comprendre une partie de ces mécanismes via un modèle murin. Ainsi, nous avons étudié l’impact de la supplémentation maternelle en probiotiques sur le système immunitaire néonatale face aux infections.Dans un premier temps, via l’administration de probiotiques Lacticaseibacillus rhamnosus (L.rh)(anciennement Lactobacillus) ou Bifidobacterium animalis subsp. Lactis (B.lactis), nous avons démontré que la protection néonatale face à une infection par Listeria monocytogenes ne semblait pas améliorée.Dans un second temps, nous avons étudié les effets de ces mêmes probiotiques dans le cadre une infection respiratoire avec le virus de la grippe de type A en début de vie. Nous avons pu mettre en évidence que cette supplémentation maternelle semblait moduler certains paramètres du système immunitaire néonatale. Ainsi, cette protection néonatale améliorée pourrait être expliquée en partie par un contrôle modéré de la charge virale et des dommages pulmonaires, une meilleure migration des cellules dendritiques conventionnelles de type 1 et une meilleure migration et fonctionnalité des lymphocytes T CD8 spécifiques au virus. De plus, la supplémentation maternelle en L.rh semble induire un recrutement plus important de lymphocytes T à mémoire virtuelle (VM) produisant plus d’une cytokine pro-inflammatoire (IFNg) afin de combattre l’infection. En plus de l’amélioration de la réponse T primaire, le développement d’une réponse T mémoire spécifique de l’infection a été observée chez les nouveau-nés dont les mères ont été supplémentées en probiotiques. Cette réserve de cellules T mémoires résidentes des tissus (Trm) et spécifiques au virus pourraient expliquer en partie leur meilleur survie lors d’une réinfection plus tard dans la vie. Enfin, ces probiotiques ne semblent pas avoir modifié la composition générale du microbiote intestinal néonatale. Cependant, certains changements de métabolites observés dans les sérums de nouveau-nés avant l’infection auraient un impact positif afin de préparer au mieux ceux-ci.Dans l’ensemble, ce travail de recherche est une avancée dans la compréhension des interactions entre le microbiote intestinal et le système immunitaire du nouveau-né. Ainsi, la modulation de certains acteurs clés (cellules dendritiques, lymphocytes T CD8, VM, Trm) via la supplémentation maternelle en probiotiques permettrait une protection améliorée face à une infection en début de vie ainsi que plus tard. Cette nouvelle solution « naturelle » pourrait être un complément intéressant à des mesures prophylactiques déjà connues telle que la vaccination dans la protection néonatale face aux infections.