Résumé : Cette thèse part d’une recherche exploratoire et de classification concernant des constructions architecturales métalliques présentes au Congo, en particulier dans le Kongo Central en République Démocratique du Congo, importées pendant la période de colonisation belge du Congo (1885 à 1960). Plus précisément, la thèse traite de la période entre 1885 et 1930.Ce thème s’avère important pour l’histoire de l’architecture belge et congolaise car, d’une part, il permet de mettre en lumière des entreprises et des acteurs principalement métropolitains qui ont contribué à la création de cette architecture métallique ; d’autre part, il apporte des contributions à l’introduction d’une architecture dite «moderne» dans l’environnement congolais, et offre des outils précis pour la comprendre et en tirer des enseignements.Ce sujet n’a été abordé que ponctuellement par des chercheurs traitant des techniques de construction du XIXe siècle, mais jamais de manière aussi située, spécifique au Kongo Central, anciennement Bas-Congo. La construction métallique, qui s’est ensuite déclinée au cours de l’histoire en architecture préfabriquée, est d’ailleurs souvent exclue du récit architectural en raison de son caractère souvent temporaire, fonctionnel ou technique.En abordant ce thème, des objectifs spécifiques ont été fixés concernant notamment les caractéristiques, les appellations, le vocabulaire et les significations autour de cette architecture coloniale, ainsi que la manière dont elle a été adaptée aux besoins et au contexte de la colonie congolaise, en passant par la classification des acteurs qui l’ont conceptualisée et fait évoluer. Comprendre le contexte a conduit la recherche à se tourner vers le concept de “monde tropical” et de tropicalisation, qui est l’un des éléments pivots de la thèse. La tropicalisation de l’architecture métallique est ainsi devenue un concept évolutif ouvrant l’analyse d’une part aux discours scientifiques, théoriques et propagandistes issus de la métropole sur la colonie congolaise, et d’autre part à l’expérience pratique de la colonie tropicale elle-même.Les archives et le terrain ont été les deux lieux qui ont permis de découvrir les différents exemples de cas, et en particulier l’image et le dessin ont été les outils qui ont conduit à l’identification des caractéristiques innovantes liées à la tropicalisation. La thèse est structurée sur trois plans, ou espaces. La raison en est que ces trois espaces mettent en évidence l’idée que l’architecture dite préfabriquée, a été un Tool of empires ou une « technique de distance », c’est-à-dire une technologie coloniale d’exploitation des territoires lointains qui tente d’en effacer la distance ; mais aussi cette structure sert pour mieux situer les personnages, les discours et les concepts. Ces espaces sont celui de la métropole ou du monde occidental, celui de la colonie congolaise ou du monde tropical, et la distance entre les deux, créée par les récits scientifiques, de propagande et les récits personnels, tels que ceux de voyage.Cette approche permet de conceptualiser la tropicalisation et ses dispositifs, systèmes et éléments comme résultats d’une perception à la fois imaginée, imposée et pratiquée du Bas-Congo.Les études de cas montrent que l’utilisation des constructions en métal est liée à des situations spécifiques dans la colonie et la métropole qui sont généralement associées à des moments critiques et d’urgence. Elles permettent également de comprendre que ce type d’architecture résulte de recherches spécifiques dans le monde de la conception technique de l’ingénierie, et que les architectes sont des acteurs superflus dans cette narration, mais que lorsqu’ils sont présents, ils se révèlent par leur sensibilité et l’inclusion d’éléments et d’aspects étrangers aux ingénieurs et aux entrepreneurs. La technicité de l’architecture6métallique est également due à son lien étroit avec les moyens de transport nécessaires pour l’amener de la métropole à l’endroit souhaité, et en particulier le chemin de fer, autre outil des empires. L’ingéniosité et les innovations sont donc liées à ce domaine ainsi qu’au climat tropical, ce qui a conduit à la déclinaison de certains dispositifs pour éviter la surchauffe des éléments métalliques et permettre un maximum de confort thermique interne.Cette thèse permet spécifiquement de mettre en lumière des entreprises, des acteurs et des bâtiments qui ont contribué à la création des premiers noyaux urbains et de certains bâtiments uniques dans le Bas-Congo ; et plus généralement, d’approfondir certains aspects de l’architecture tropicale et d’en reconstruire une généalogie plus longue et plus complexe que ce que la narration commune rapporte.