Former aux pratiques innovantes pour repenser l’intervention et penser l'État d’intervention sociale
par Artois, Pierre
Référence Sociétés en crise et travail social : Explorer les dynamiques politiques, de formations, de recherches, d’interventions et d’expériences (10ème Congrès Internationale: Du 3 au 7 juillet 2023: Paris)
Publication Non publié, 2023-07-04
Référence Sociétés en crise et travail social : Explorer les dynamiques politiques, de formations, de recherches, d’interventions et d’expériences (10ème Congrès Internationale: Du 3 au 7 juillet 2023: Paris)
Publication Non publié, 2023-07-04
Communication à un colloque
Résumé : | Les professionnels du travail social et plus largement de l’intervention sociale vivent les crises successives de manière plurielle. Non seulement parce qu’ils et elles s’occupent de publics précarisés, en décrochage ou isolés. Mais également car leurs pratiques professionnelles sont constamment remises en question (Artois, 2018). Depuis des années, les groupes professionnels de l’intervention sociale subissent de nombreux mouvements de professionnalisation/déprofessionnalisation (Demailly, 2013). Ces injonctions incitent à répondre aux rationalisation des politiques et de leurs dispositifs afin d’être plus efficace et « responsive » face aux administrations publiques. Ces mouvements discontinues placent les professionnel.le.s aux antipodes de la nature prudentielle du travail social (Karsz, 1994; Vrancken, 2019).Dans ce cadre, l’antienne actuelle s’apparente à pousser les intervenants sociaux à « innover », à renouveler les pratiques d’intervention et à collaborer avec les chercheurs et chercheuses (Reason & Bradebury, 2006). De ce fait, les pratiques émergentes basées sur le paradigme de l’innovation sociale (Cloutier, 2003) prennent de plus en plus de place et deviennent courantes. Elles sont poussées par les pouvoirs publics pour que les acteurs du travail social et plus largement de l’intervention sociale intègrent ces méthodologies d’expérimentations collectives et citoyennes (Rullac, 2021).D’une part, la multiplication de ces pratiques actuelles invitent à repenser le cadre du travail social et de ses interventions (Artois et al., 2023; Jaeger, 2016) à travers les phénomènes de rationalisation et de pression pour l’efficacité, de travailler avec et non pour les usagers et d’expérimenter par projets pour renouveler les pratiques. Dans cette optique, les innovations en travail social apparaissent comme des solutions et des processus (Rullac, 2019). Une dynamique qui permet de renouveler les savoirs, les pratiques, de justifier l’implication des différents acteurs pour favoriser la coopération.D’autre part, ces évolutions nous permettent de réfléchir aux dynamiques socio-politiques qui se jouent derrière ce phénomène. La solidarité actuelle a montré ses limites face aux nouvelles attentes et aux singularités des parcours de vie (Vrancken, 2010). Or, l’évolution de nos modèles intégrateurs se construit dans une perspective où les politiques se rapprochent des individus, des citoyens pour tisser des liens sociaux où les relations d’intervention créent et solidifient le lien social certes, mais dans une relation qui devient profondément marchande(Duchamp, 1989). Ces dynamiques sont des espaces potentiels d’action en réponses à des besoins locaux non satisfaits qui s’analysent souvent à travers la notion d’innovation sociale mais qui permettent surtout de saisir les interactions des professionnels avec des collectifs, des citoyens, des usagers qui abordent la question des inégalités pour repenser la solidarité (Castel & Duvoux, 2013). Les pratiques d’ innovations sont bien des pratiques professionnelles prudentielles invitant à repenser les interventions. Et plus largement à repenser la conception des politiques sociales à partir de ce que nous apprennent justement les innovations et les intervenants sociaux sur comment se construit aujourd’hui la question du social et de l’intégration (Artois., 2022b).Dès lors, comment former les acteurs à intégrer ces changements au sein de leurs pratiques professionnelles ? Notre communication vise à présenter l’intégration de ces nouveaux savoirs et méthodes au sein d’une formation continue universitaire en Région de Bruxelles-Capitale, le cas du certificat interuniversitaire européen en travail, développement et innovation sociale. Cette étude de cas nous permet de présenter comment les postures professionnelles évoluent. De déplier le dialogue entre normes établies et expérimentations qui refondent l’éthos professionnel. Comment l’intégration de pratiques spécifiques et savoirs provenant d’autres disciplines favorisent l’inventivité et la créativité (Artois et Dehon, 2022b). Enfin, ce programme étant soutenu par le Gouvernement de la Région de Bruxelles-Capitale, notre propos interrogera aussi le processus d’institutionnalisation par les instances politiques et administratives. |