par Griffet, Célia
Président du jury Sparenberg, Jean-Marc
Promoteur Cerf, Nicolas
Publication Non publié, 2023-08-30
Président du jury Sparenberg, Jean-Marc
Promoteur Cerf, Nicolas
Publication Non publié, 2023-08-30
Thèse de doctorat
Résumé : | La non-classicalité d'un état monomode de la lumière et l'intrication d'états photoniques bipartites sont des phénomènes quantiques centraux composant deux des différences les plus essentielles entre les domaines classique et quantique. Depuis leur découverte, ces propriétés ont suscité un intérêt considérable et constant de la part de la communauté des physiciens, dans le but de développer des protocoles basés sur ces phénomènes et qui n'ont pas d'équivalent classique. Pour prendre un seul exemple, l'intrication de deux photons peut être utilisée comme ressource pour effectuer de la cryptographie quantique, c'est-à-dire pour distribuer une clé secrète de manière sécurisée entre deux parties qui n'ont même pas besoin de faire confiance à leurs dispositifs quantiques. Afin d'exploiter ces propriétés et de développer des sources optiques d'états non-classiques ou intriqués, il est crucial de pouvoir détecter si l'état émis par la source est effectivement non-classique ou intriqué. Dans cette optique, de nombreux témoins (conditions suffisantes) de non-classicalité ou d'intrication ont été conçus au fil des années.Dans cette thèse, nous nous intéressons particulièrement à une hiérarchie de critères qui a été développée par Shchukin, Richter et Vogel au début des années 2000. Le témoin le plus courant de l'intrication est le critère PPT de "positive partial transpose", qui stipule que tout état séparable doit rester physique après avoir subi une transposition partielle. Si cette condition n'est pas remplie, cela signifie que l'état est intriqué. Sur cette base, un ensemble complet de critères a été exprimé par ces auteurs à partir d'une matrice de moments des opérateurs de mode (création et annihilation). De même, un ensemble de critères a été construit sur la base d'une matrice de moments dans l'ordre normal afin d'exprimer la non-négativité de la fonction P de Glauber, donnant lieu à une hiérarchie de témoins de non-classicalité.La principale difficulté dans la détection pratique de la non-classicalité ou de l'intrication est la mesure des quantités nécessaires à l'application de ces critères. En effet, il est souvent nécessaire de recourir d'abord à une tomographie complète de l'état quantique, c'est-à-dire de reconstruire la matrice densité dans son intégralité, ce qui est une procédure très coûteuse car elle nécessite d'effectuer un très grand nombre de mesures. Les divers témoins de non-classicalité ou d'intrication de Shchukin, Richter et Vogel peuvent éviter la tomographie complète mais nécessitent des mesures séquentielles inefficaces pour toutes les entrées des matrices. La principale motivation de cette thèse est donc de remédier à ce manque de mise en oeuvre pratique simple. À cette fin, nous développons une méthode multi-copie inspirée d'un travail de Brun, dans laquelle plusieurs copies identiques et indépendantes (répliques) de l'état optique sont traitées dans un interféromètre linéaire, suivi d'un ensemble de photodétecteurs résolvant le nombre de photons. Nous appliquons tout d'abord cette méthode à la hiérarchie de non-classicalité susmentionnée. Nous sélectionnons certains des critères d'ordre inférieur les plus intéressants au sein de cette hiérarchie et analysons leur capacité de détection sur des cas tests, tels que les états comprimés, les états de Fock et les états-chat de Schrödinger. Nous concevons plusieurs schémas optiques à deux ou trois copies mettant en oeuvre ces critères et montrons que le pouvoir de détection s'échelonne généralement avec le nombre de copies. Il apparaît également que l'ajout d'une copie supplémentaire permet parfois de rendre le critère invariant en cas de déplacements dans l'espace des phases. En outre, nous mettons en évidence un critère à quatre copies particulièrement efficace qui, s'il était implémenté, permettrait la détection de la non-classicalité de tous les états cités en exemple ci-dessus (y compris les états déplacés).Ensuite, nous nous intéressons à une autre quantité qui a été récemment mise en avant pour témoigner de la non-classicalité optique, à savoir la "quadrature coherence scale". Cette quantité mesure la distance sur laquelle les composantes en quadrature (x,p) du champ optique perdent leur cohérence, indiquant la non-classicalité dès qu'elle dépasse un certain seuil. Nous concevons un schéma de mesure multi-copie de cette quantité, qui contourne le besoin d'une tomographie d'état complète. Nous prouvons que son implémentation ne nécessite qu'un diviseur de faisceau équilibré agissant sur deux répliques de l'état, suivi de mesures du nombre de photons et d'un post-traitement classique. En outre, nous générons des données synthétiques et prouvons que la forme de la distribution du nombre de photons à la sortie de l'interféromètre nous renseigne sur la valeur du témoin et donc sur le degré de non-classicalité de l'état examiné.Troisièmement, nous abordons la hiérarchie susmentionnée des témoins d'intrication et développons des procédures multi-copie pour mesurer trois témoins particuliers. Ces procédures consistent à utiliser des interféromètres locaux des deux côtés de l'état bipartite, suivis à nouveau par des mesures du nombre de photons et un post-traitement classique. La dérivation repose sur la représentation de Jordan-Schwinger des observables de spin en termes d'opérateurs multimodes. Nous montrons que ces témoins détectent l'intrication de tous les états gaussiens intriqués et, pour les témoins d'ordre 4 considérés, également les états-chat intriqués de Schrödinger et certains états N00N. Nous analysons en outre l'influence de certaines imperfections pratiques importantes qui pourraient entraver ces schémas de mesure multi-copie, à savoir les copies imparfaites (résultant des fluctuations de la source) et les pertes optiques dans le circuit.Comme quatrième contribution de cette thèse, nous concevons un nouveau critère de séparabilité pour les états bipartites qui s'inspire des observables de spin multi-copie associées au critère PPT. Nous comparons ce critère aux critères les plus courants et montrons qu'il implique le critère de Mancini et al., qui à son tour implique le critère de Duan et al. Il s'agit donc d'une condition nécessaire et suffisante pour la détection d'intrication d'états intriqués gaussiens, et par conséquence d'un témoin d'intrication fort pour des états arbitraires basés sur des moments du second ordre (ne nécessitant même pas de procédure d'optimisation). Dans l'ensemble, cette thèse souligne le large éventail d'applications de la technique multi-copie en optique quantique et en information quantique à variation continue. |
The so-called nonclassicality of a single-mode state of light and the entanglement of bipartite photonic states are central quantum phenomena which underlie two of the most essential differences between the classical and the quantum. Since their discovery, these properties have attracted a tremendous, constant interest from the quantum physics community, with the goal of developing protocols that take advantage of them and have no classical counterpart. To take a single example, the entanglement of two photons can be used as a resource to perform quantum cryptography in a device-independent manner, that is, to distribute a secret key in a secure way between two parties who do not even need to trust their quantum devices. In order to exploit these properties and develop optical sources of nonclassical or entangled states, it is crucial to be able to detect whether the state emitted by the source is effectively nonclassical or entangled. Along this way, numerous witnesses (sufficient conditions) for nonclassicality or entanglement have been conceived over the years.In this thesis, we are especially interested in a hierarchy of criteria that has been developed by Shchukin, Richter, and Vogel in the early 2000s. The most common witness of entanglement is the PPT criterion for "positive partial transpose'', which states that any separable state must remain physical after undergoing a partial transpose. If this condition is not met, it means that the state is entangled. Based on this, a complete set of criteria was expressed by these authors based on a matrix of moments of the mode (creation and annihilation) operators. Similarly, a set of criteria was built based on a matrix of normally-ordered moments in order to express the non-negativity of the Glauber-Sudarshan P-function, giving rise to a hierarchy of nonclassicality witnesses.The main difficulty in the practical detection of nonclassicality or entanglement is the measurement of the quantities that are needed to apply these criteria. As a matter of fact, it is often mandatory to resort first to complete quantum state tomography, i.e., reconstructing the density matrix in its entirety, which is a very costly procedure as it requires performing a huge amount of measurements. The various witnesses for nonclassicality or entanglement due to Shchukin, Richter, and Vogel may avoid full tomography but require inefficient sequential measurements for all entries of the matrices. Overcoming this lack of simple practical implementation is the main motivation of this thesis. For this purpose, we develop a multicopy method inspired from an early work by Brun, in which several identical and independent copies (replicas) of the optical state of interest are processed in a linear interferometer, followed by a bunch of photodetectors with photon-number resolution. First, we apply this method to the above nonclassicality hierarchy. We select some of the most interesting low-order criteria within this hierarchy and analyze their detection capability on test cases, such as squeezed states, Fock states, and Schrödinger cat states. We devise several two- or three-copy optical schemes implementing these criteria and show that the detection power generally scales with the number of copies. It also appears that adding an extra copy sometimes enables making the criterion invariant under displacements in phase space. Further, we highlight an especially efficient four-copy criterion which, if realized, would enable the detection of the nonclassicality of all of the above example states (including displaced states).Second, we turn to an alternative quantity that has recently been put forward to witness optical nonclassicality, namely the quadrature coherence scale. This quantity measures the scale over which the (x,p) quadrature components of the optical field lose their coherence, indicating nonclassicality as soon as it exceeds some threshold. We design a multicopy measurement scheme of this quantity, which circumvents the need for full state tomography. We prove that its implementation only requires a balanced beam splitter acting on two replicas of the state, followed by photon number measurements and classical postprocessing. Moreover, we generate synthetic data and prove that the shape of the photon number distribution at the output of the interferometer gives us information on the value of the witness and thus on the degree of nonclassicality of the state under scrutiny.Third, we address the above hierarchy of entanglement witnesses and develop multicopy procedures to measure three selected such witnesses. These procedures consist in using local interferometers on both sides of the bipartite state, followed again by photon number measurements and classical postprocessing. The derivation relies on the Jordan-Schwinger representation of spin observables in terms of multimode operators. We show that these witnesses detect the entanglement of all entangled Gaussian states, and, for the considered 4th-order witnesses, also the entangled Schrödinger cat states and some N00N states. We further analyze the influence of some of the dominant practical imperfections that could hinder these multicopy measurement schemes, namely, imperfect copies (resulting from source fluctuations) and optical losses in the circuit.As a fourth contribution of this thesis, we devise a new separability criterion for bipartite continuous-variable states that is inspired from the multicopy spin observables associated with the PPT criterion. We compare this criterion to the most common criteria and show that it implies Mancini et al.'s criterion, which in turn implies Duan et al.'s criterion. It is therefore a necessary and sufficient condition for the entanglement detection of Gaussian entangled states, and hence a strong entanglement witness for arbitrary states based on second-order moments (not even requiring any optimization procedure). Overall, this thesis emphasizes the wide range of applicability of the multicopy technique in quantum optics and continuous-variable quantum information. |