par Spor, Marine
Référence Congrès de l'Association française de Sociologie (10e congrès: 4 au 7 juillet 2023: Lyon)
Publication Non publié, 2023-07-06
Référence Congrès de l'Association française de Sociologie (10e congrès: 4 au 7 juillet 2023: Lyon)
Publication Non publié, 2023-07-06
Communication à un colloque
Résumé : | Le concept de carrière possède en sciences sociales une longévité certaine attestée par un usage fécond dans différents domaines de la sociologie comme le remarquait Coavoux (2010). Outil interactionniste d’objectivation (Darmon, 2008), le concept de carrière se prête particulièrement à la constitution de catégories - par le biais d’agrégation qualitative - et qui doivent être comparable entre elles (Chapoulie, 1996, Becker, 2016) et que l’enquête permet de mettre à jour (Hughes, 1996, 165)Pour cette communication nous mobilisons le concept de carrière dans le sens de H. Becker dans son ouvrage Outsiders (1985), appliqué ici à la consommation de vêtements de seconde main. L’objet de cette communication s’insère dans un contexte de renouveau du secteur de la seconde main textile, secteur historiquement centré sur la revalorisation (Barles 2011) - grâce à la montée en puissance du référentiel du développement durable (Hammam, 2011) et de l’économie circulaire (Ezvan, 2020) . Ceci est attesté à la fois dans la littérature mais aussi dans les politiques publiques mises en place à l’échelle européenne (voir le Pacte vert pour l’Europe en 2020, ou encore Stratégie de l’Union européenne pour des textiles durables de la Commission européenne, adoptée en 2022) et présentes dans plusieurs pays (par exemple, le Programme Régional en Économie Circulaire en Région Bruxelloise – PREC - ou encore La feuille de route économie circulaire française - FREC). Ce secteur souffrant d’une surproduction massive, la seconde main apparaît au niveau des consommateur·ice·s comme une solution a priori peu coûteuse pour agir à leur niveau sur des problématiques environnementales. Dans ce cadre, cette communication analyse les pratiques de consommation de seconde main textile – appelées consommation circulaire - sous l’angle d’une carrière de consommation (Becker, 1985) montrant la constitution, dans une optique biographique, dynamique et diachronique, d’une carrière de consommation circulaire. La carrière de consommation est ainsi marquée par des apprentissages séquentiels, pour in fine, devenir un mode de vie, sauf si l’expérience échoue et provoque un retour en arrière dans les habitudes. Toutefois ces carrières de consommation ne sont pas hors sol mais bien imbriquées dans un espace urbain. Ces carrières doivent alors être mises en relation dans l’enquête avec les pratiques spatiales de ces mêmes consommateur·rice·s. Ainsi, nous examinons s’il est possible d’étendre le concept de carrière, pris dans son itération beckerienne, (Becker, 1985) dans ses implications spatiales, dans le contexte de la consommation circulaire de seconde main textile.Pour cela nous utilisons deux outils méthodologiques : l’entretien semi-directif et les cartes mentales. Quarante-six entretiens semi-directifs d’une durée allant de 1 h à 2 h ont été menés auprès de consommateur·ice·s bruxellois·e·s, avec guide d’entretien, sur les pratiques de consommation textile dans des commerces d’économie circulaire en Région de Bruxelles-Capitale, entre novembre 2018 et mars 2021. Ces entretiens étaient complémentés par la réalisation d’une carte mentale à la fin de chaque entretien qui visait à interroger la spatialisation de cette consommation, du point de vue de l’enquêté·e, dans une perspective d’objectivation des pratiques. Si le·a consommateur·ice a été étudié·e plongé·e dans son environnement d’achat (Badot, 2005), peu d’études ont été réalisées sous le prisme de la carte et de la spatialité urbaine. Reprenant les distinctions décrites par Robert Kitchin (1994), notre but est à la fois de nous servir des cartes mentales dans le sens d’une représentation analogique de l’espace (la carte mentale est comme une carte) et dans un sens d’une métaphore de l’espace, la carte mentale étant utilisée comme si elle était une carte, agissant ainsi comme si les enquêté·e·s avaient une carte dans la tête (Kitchin, 1994). Les cartes mentales demandent aux enquêté·e·s une « définition verbale et non verbale » de leur espace de consommation (Lévy, Fauchille, et Povoas 2018). Notre but est de comprendre le sens donné à un espace de consommation ordinaire circulaire.Cette enquête a ainsi mis au jour six type de carrière de consommateur·ice·s circulaires qui embarquent chacun une série de compromis dans leurs pratiques. Ces compromis apparaissent également à l’échelle urbaine et dans l’espace fréquenté par les consommateur·ice·s par l’intermédiaire de l’analyse des cartes mentales. Iels construisent à partir de leurs pratiques une cartographie de compromis de Bruxelles lors de leurs déplacements. L’espace commercial n’est ni neutre, ni foncièrement vénal, ni foncièrement éthique : il est, tout comme ce que mettent en évidence les carrières, producteur de compromis à différentes échelles, attestant des tentatives des consommateur·ice·s de mettre en accord leurs pratiques avec leurs valeurs. |