Résumé : Les infections microbiennes causées par des agents pathogènes résistants aux thérapies sont en hausse dans le monde. Ce problème touche non seulement les pays développés mais surtout les pays en voie de développement. Dans les milieux ruraux, les habitants n’ont pas accès aux conditions sanitaires appropriées. La majorité des hôpitaux de l’Afrique sub-saharienne sont cités parmi les plus faibles du monde en termes de qualité de soins et de moyens disponibles. La prolifération des officines pharmaceutiques « clandestines » qui échappent au contrôle des États minés par la corruption et le laxisme est un signe de la difficulté d’apporter des solutions satisfaisantes aux problèmes de la population. Cet état de fait entraine un trafic frauduleux et un large usage de « faux médicaments » par la population. Le manque de traitements efficaces est l’une des causes des maladies infectieuses présentant une résistance aux antibiotiques. Face à ces fléaux, il est nécessaire de développer de nouveaux agents antimicrobiens.Les acides hydroxamiques (AH) présentent diverses propriétés biologiques contre les bactéries, les champignons, les virus et les cellules cancéreuses. Ils sont aussi de puissants inhibiteurs d’enzymes tels que les hydrolases, l’uréase, la tyrosinase, l’élastase, l’aminopeptidase, les peroxydases, les métalloprotéinases, les histones déacétylases, la peptide déformylase et les anhydrases carboniques. L'activité antimicrobienne des AH convertis en leurs chélates métalliques est améliorée par rapport aux composés non-complexés. La fonction hydroxamate est souvent décrite comme étant à l’origine de l’activité biologique. Cependant, la lipophilie et le type de métal de coordination dans les complexes pourraient être des éléments importants influençant les activités antimicrobiennes de ces composés chimiques.C’est dans cette optique que nous avons synthétisé et caractérisé quarante-deux composés dont six AH et trente-six complexes de Fe (II/III), de Ni (II), de Cu (II) et de Zn (II) à chaines carbonées C2, C6, C8, C10, C12 et C17. En ce qui concerne le choix des métaux, nous avons dû sélectionner un nombre raisonnable d'éléments chimiques pour limiter l'ampleur du travail. Nous avons opté pour des métaux connus pour leurs propriétés antibactériennes mais aussi sur ceux qui sont considérés comme moins toxiques pour l'homme, afin de déterminer leurs propriétés anti-infectieuses et cytotoxiques. Le choix de ces métaux se justifie de la sorte :• Fe : nombreux exemples de complexes de Fe antibactériens et toxicité relativement faible pour les cellules humaines.• Ni : connu comme toxique pour les cellules humaines mais nous aimerions analyser l'indice de sélectivité.• Cu : utilisé dans les revêtements de surfaces antibactériennes et nombreuses références de complexes de Cu antibactériens. Le cuivre et ses dérivés ne présentent pas d’effets toxiques par voie cutanée.• Zn : déjà utilisé en pratique clinique en dermatologie et comme composé antibactérien et antifongique (exemples : ZnO et undécylénate de Zn). Le zinc est faiblement toxique par inhalation et par voie orale.Nous avons évalué les propriétés antibactériennes et antifongique des AH et leurs complexes sur sept bactéries (quatre à Gram positif et trois à Gram négatif), quatre mycobactéries et un champignon. En outre, leurs effets antibiofilm ont été évalués sur trois souches de Mycobacterium (M. bovis BCG, M. marinum et M. tuberculosis) et sur le Pseudomonas aeruginosa. La cytotoxicité des composés ayant une activité antimicrobienne significative a été évaluée sur des cellules cancéreuses du col de l’utérus (SiHa). Les AH à chaîne carbonée C10 et C12 ont montré une activité antimicrobienne alors que leurs homologues à C2, C6 et C8 ont été inactifs. Cela montre que la lipophilie due à la longueur de chaîne carbonée influence les propriétés antibactériennes et antifongiques. Les complexes de Fe (II/III) à C6 et C8 ont présenté une activité sur Staphylococcus aureus sensible à la méticilline alors que les AH correspondants sont inactifs sur cette même souche. L’amélioration de l’activité des AH lorsqu’ils sont complexés, déjà observée dans des travaux précédents, est corroborée par ces résultats. Avec les complexes de Zn (II) et le ZnCl2, une inhibition de l’Escherichia coli a été observée. Indépendamment de la longueur de la chaîne carbonée, les propriétés antibactériennes peuvent être tributaires de la nature du métal de coordination. Les résultats sur les propriétés antimicrobiennes de l’AH à C12 ont montré un effet bactéricide sur Staphylococcus aureus sensible à la méticilline, Corynebacterium glutamicum, Escherichia coli et un effet fongicide sur le Candida albicans. L’effet des complexes de Fe (II/III) à C12 sur le Mycobacterium smegmatis est bactériostatique. Les propriétés antifongiques des complexes de Ni (II) et Cu (II) à C12 sur Candida albicans montrent qu’ils ont une action inhibitrice (fongistatique) alors que leur homologue de Zn (II) est fongicide sur la même souche. Tous les AH et leurs complexes étudiés dans cette recherche sont inactifs sur Pseudomonas aeruginosa et Klebsiella pneumoniae.Le processus de formation du biofilm chez le M. bovis et le M. tuberculosis est plus sensible aux complexes de Fe (II/III) à chaîne carbonée ≥ C8. L’inhibition de la formation du biofilm du M. marinum est observée avec un effet plus significatif qu’avec les complexes de Fe (III) à C8, C10 et de Ni (II) à C8. La formation de biofilm du Pseudomonas aeruginosa n’est affectée par la série de complexes utilisés lors du test qu’à des concentrations élevées. A part l’inhibition de la formation du biofilm des trois souches du Mycobacterium par ces composés, aucun effet inhibiteur significatif sur le M. bovis et le M. marinum n’a été observé avec l’ensemble des AH et leurs complexes. L’inhibition de la formation du biofilm peut en effet être observée indépendamment d’un effet sur la croissance des micro-organismes pathogènes.Bien que présentant un large spectre d'activités antimicrobiennes, l’AH à C12 est néanmoins cytotoxique sur les cellules SiHa. Ses complexes de Ni (II), de Cu (II) et Zn (II) à effet antifongique significatif sur le Candida albicans ont une cytotoxicité plus modérée sur ces mêmes cellules. Ces résultats montrent que les AH et leurs complexes à C12 pourraient être utilisés pour le développement de nouveaux composés antibactériens et antifongiques. Cependant, il serait intéressant de déterminer leur mécanisme d'action précis sur les micro-organismes et aussi envisager des tests pharmacologiques éventuels in vivo.Hydroxamic acids (HA) exhibit various biological properties against bacteria, fungi, viruses and cancer cells. HA are also potent inhibitors of enzymes such as hydrolases, urease, tyrosinase, elastase, aminopeptidase, peroxidases, metalloproteinases, histone deacetylases, peptide deformylase and carbonic anhydrases. The antimicrobial activity of HA converted to their metal chelates is enhanced compared to uncomplexed compounds. The hydroxamate function is often described as the source of biological activity. However, the lipophilicity and the type of coordination metal in the complexes could be important elements influencing the antimicrobial activities of these chemical compounds.With aforementioned objective, a total of forty-two compounds including six AH and thirty-six complexes of Fe(II/III), Ni(II), Cu(II) and Zn(II) with carbon chains at C2, C6, C8, C10, C12 and C17 were synthesized and characterized. We had to select only some metals to limit the extent of the work. We focused on metals well known for their antibacterial properties and on those considered as less toxic to humans, in order to analyze their selectivity between infectious agents and human cells. We justify that choice as follows:• Fe: many examples of antibacterial Fe complexes and relatively low toxicity to human cells.• Ni: known as toxic to human cells but we would like to analyze the selectivity index.• Cu: used in antibacterial surfaces coatings and numerous references of Cu complexes for antibacterial. Copper and complexes are relatively less toxic by skin route.• Zn: already used in clinical practice in dermatology, as antibacterial and antifungal compound (examples: ZnO and Zn undecylenate). Zinc has low toxicity by inhalation and oral pathway.We evaluated the antibacterial and antifungal properties of HA and their complexes against seven bacteria (four Gram- positive and three Gram- negative), four mycobacteria and one fungi. In addition, their antibiofilm effects were realized against three strains of Mycobacterium (M. bovis BCG, M. marinum and M. tuberculosis) and against Pseudomonas aeruginosa. The cytotoxicity of selective compounds was evaluated against cervical cancer cells (SiHa).HA with C10 and C12 carbon chain showed antimicrobial activity while their counterparts at C2, C6 and C8 were inactive. This shows that the lipophilicity due to the carbon chain length influences the antibacterial and antifungal properties more. The Fe(II/III) complexes at C6 and C8 exhibited activity against methicillin-sensitive Staphylococcus aureus, whereas the corresponding HA are inactive against the same strain. The improvement in the activity of HA when they are complexed, already observed in previous work, is corroborated by these results. With Zn(II) complexes and ZnCl2, inhibition of Escherichia coli was observed. Regardless of the length of the carbon chain, the antibacterial properties may be dependent on the nature of the coordination metal.The results on the antimicrobial properties of HA at C12 showed a bactericidal effect against methicillin-sensitive Staphylococcus aureus, Corynebacterium glutamicum, Escherichia coli and a fungicidal effect against Candida albicans. The effect of Fe(II/III) complexes at C12 against Mycobacterium smegmatis is bacteriostatic. The antifungal properties of the complexes of Ni(II) and Cu(II) at C12 against Candida albicans show an inhibitory action (fungistatic) while their Zn(II) counterpart is fungicidal against the same strain. All HA and their complexes studied in this research were found to be inactive against Pseudomonas aeruginosa and Klebsiella pneumoniae.The process of biofilm formation in M. bovis and M. tuberculosis is more sensitive to Fe(II/III) complexes with a carbon chain ≥ C8. The inhibition of M. marinum biofilm formation is observed with a significant effect only with the Fe(III) at C8, C10 and the Ni(II) complex at C8. The formation of Pseudomonas aeruginosa biofilm is only affected by the series of complexes used during assay at high concentrations. Despite the inhibition of the three strains of Mycobacterium biofilm by these compounds, no significant inhibitory effect on M. bovis and M. marinum was observed with all of the HA and their complexes. Inhibition of biofilm formation can indeed be observed without an effect on the growth of pathogenic microorganisms.Although exhibiting a broad spectrum of antimicrobial activity, HA at C12 is nevertheless cytotoxic against SiHa cells. Metal complexes of this derivative with Ni(II), Cu(II) and Zn(II) found to be having a significantly antifungal effect against Candida albicans and moderate cytotoxicity against the same cells. These results show that HA and their complexes at C12 could be used for the development of new antibacterial and antifungal compounds. However, it would be necessary to determine their precise mechanism of action against micro-organisms and also consider possible pharmacological assays in vivo.