par Van Acker, Wouter ;Chancel, Victoire ;Frick-Cloupet, Carla
Référence Editions de la Faculté d'Architecture ULB, Bruxelles
Publication A Paraître, 2024-08-01
Référence Editions de la Faculté d'Architecture ULB, Bruxelles
Publication A Paraître, 2024-08-01
Direction d'ouvrage
Résumé : | Le projet d’architecture, dans sa conception comme sa représentation, se développe sur une série de médiums distincts qui renvoient continuellement les uns aux autres. Ce jeu intermédial tend aujourd'hui à se renforcer face à la démultiplication des espaces de diffusion de l'architecture. Depuis une vingtaine d'années au moins, les médiations de l'architecture ont littéralement explosé, que ce soit par l’institutionnalisation grandissante de la culture architecturale (expositions, publications, conférences, prix, etc.), ou par la démocratisation des sites internet et des réseaux sociaux où s'affiche le travail des agences (sites spécialisés comme divisare, mais aussi Facebook, Instagram, Pinterest, Youtube, etc.). Au sein de cette sphère élargie de la représentation de l'architecture, les interactions, les échanges et les fusions entre les différents médiums posent une nouvelle fois comme pertinente la question du "champs étendu" de l'architecture (Krauss 1979, Papapetros et Rose 2014). Certains architectes investissent de façon stratégique cette condition médiale contemporaine ou la questionnent de façon réflexive. Ainsi, dans les discours purement visuels de la sphère digitale apparaissent de nouvelles formes de méta-références, où la représentation de l’architecture est doublée d’une réflexion sur le médium même (Wolf, Bantleon and Thoss 2009). Dans le domaine des expositions d’architecture par exemple, resurgissent des stratégies réflexives issues des arts visuels des années 1960 qui mettaient en tension l’espace même du musée, pour leur capacité à interroger le cadre institutionnel et les limites disciplinaires de l’architecture (Foster 1996).Cette condition protéïforme du projet et les renvois entre médias qu’elle engendre a été relativement peu étudiée en architecture sous le prisme de ce que les media et cultural studies ont appelé « l’intermédialité ». Si l’intertextualité regarde « le passage d’un système de signes à un autre » dans des textes écrits (Kristeva 1967, 59), l’intermédialité peut être considérée comme l’étude du passage d'un médium à l’autre. La spécificité de l’approche intermédiale est qu’elle ne s’intéresse pas tant à la représentation au sein d’un médium donné, mais à la reconstruction des interactions intermédiatiques (Rajewksy 2005) dont dépend la notion même de représentation (Ribouillault 2020). En d'autres termes, l'intermédialité ne regarde pas l'objet uniquement à l'intérieur d'une forme médiatique mais au contraire, à l'intersection des différents médiums. En architecture, l'intermédialité peut ainsi renvoyer aux transpositions d’un medium à l’autre (e.g. l'exposition des photos d’un bâtiment dans le bâtiment), à la rencontre de différents médiums pour représenter un même objet (e.g. les interactions entre la maquette, la photo, le collage, etc.), ou encore à des transferts de codes entre les disciplines (e.g. la superposition des conventions de la peinture sur une perspective architecturale). Le déploiement du projet architectural sur plusieurs espaces médiatiques peut être regardé comme un phénomène récent. Ainsi pour certains, cette condition de l’architecture est intimement liée à l'apparition de nouvelles techniques (comme la photographie) et espaces de diffusion propres au XXe siècle (Colomina 1979), l’époque moderne transformant ainsi l’architecture en un champs médiatique. Guattari (1996) et Weibel (2012) voient eux dans notre temps présent une condition « post-medium » dans laquelle la spécificité propre à chaque média est niée au profit d’un entremêlement des médias allant jusqu’à leur indifférenciation. Au demeurant, l'idée que l'architecture s'inscrit de façon corrélée sur plusieurs modes d'existence n'est pas nouvelle. Ainsi, pour d’autres, la complicité entre média est consubstantielle à la fondation de l'architecture en tant que discipline à partir du moment où celle-ci s'établit sur la notion de projet, et non plus seulement sur l'objet bâti (Simonnet 2001).Ce numéro de CLARA invite à questionner la contemporanéité de la condition intermédiale de l'architecture au regard d'un régime médiatique que l’on peut considérer comme nouveau ; mais dont on peut également relativiser l'historicité en reconnaissant l’intermédialité comme une caractéristique fondamentale de l’architecture. Nous invitons tout particulièrement des contributions construites à partir de cas d'étude qui focalisent sur l'intermédialité comme moteur pour faire projet, où les interactions médiales peuvent devenir un outil de conception. Ce numéro encourage des contributions qui analysent et restituent la réflexivité des relations entre les différents domaines d'existence du projet architectural en regardant les situations de déplacement de contenu d'un média à l'autre ou encore les lieux de trouble entre l'espace médiatique et l'espace publicitaire. Enfin, nous encourageons les contributions qui voudraient se saisir du format même de la contribution académique pour l'emmener vers une proposition intermédiale qui interroge son propre cadre : les jeux d’interactions entre collages, dessins, photographies et textes sont les bienvenus. |