Résumé : L’objectif de cette recherche est d’analyser les pratiques des acteurs qui participent à laproduction de nouvelles locales dans l’écosystème médiatique bruxellois afin de questionner leconcept de « journalisme participatif ». Pour ce faire, l’étude adopte un regard original sur lesprocessus de production de nouvelles sur internet considérant ceux-ci non comme le résultatd’une pratique professionnelle, mais bien d’une pratique sociale qui inclut non seulement lesjournalistes professionnels, mais aussi des blogueurs, politiciens, activistes, lanceurs d’alerte,ou citoyens. Après avoir fourni un panorama des différents producteurs de nouvellesrépertoriés, la théorie de l’acteur-réseau (ANT) et le modèle ADD (accès-dialogue délibération)sont utilisés pour analyser deux cas particuliers (deux controverses) afin d’appréhendercomment la configuration du réseau formé par les acteurs interagissant au cours du tempsgénère certains types de pratiques participatives. La partie empirique de la thèse comprend doncde la veille en ligne afin de détecter les sites proposant des nouvelles sur Bruxelles en ligne(N=295), la détection de controverses (N=2) au moyen des contenus produits par cesproducteurs et l’analyse de celles-ci via une analyse de nouvelles produites (N=388), desentretiens semi-directifs (N=23), de l’observation en ligne et une approche ethnographique avecde l’observation participante pour un des cas. De cette façon, la thèse a pour but d’enrichir lesdébats en sociologie du journalisme de trois façons : (1) en adoptant une approcheécosystémique peu usitée dans la discipline, (2) en reproblématisant les concepts de« participation » et de « journalisme participatif », et (3) en fournissant des données empiriquessur le contexte local bruxellois, jusqu’ici peu exploré.La catégorisation des sites produisant des nouvelles en ligne basée sur des similitudes formellesa permis d’établir trois types de producteurs distincts : les producteurs épisodiques, lesproducteurs thématiques et les producteurs intensifs. L’analyse formelle de ceux-ci montre bienqu’il existe peu de dispositifs participatifs en ligne, ce qui contredit une partie de la littératureexistante sur la question. En effet, la grande majorité des sites analysés se limitent à offrir unaccès à la communauté de pratiques constitutive de ceux-ci via une page de contact, ou undialogue autour des problèmes publics via la possibilité de commenter une nouvelle soitdirectement sur le site, soit sur les réseaux sociaux. Un petit nombre de sites offrent toutefoisun accès à la production de nouvelles en permettant de soumettre des idées voire des nouvellescomplètes.L’analyse des controverses montre qu’il existe bien entendu une diversité d’acteurs produisantde l’information locale et ils sont fortement connectés en ligne. Tous ces acteurs participent àl’écosystème local bien qu’à des niveaux différents, pour gagner l’attention du grand public.Toutefois, les médias que l’on peut qualifier d’« historiques » et leurs journalistesprofessionnels restent les producteurs d’information principaux au quotidien, ils occupent uneplace hégémonique dans l’écosystème médiatique bruxellois. Les personnalités politiques fontappel aux médias « historiques » via des communiqués et conférences de presse, ainsi qu’àd’autres producteurs de nouvelles en ligne et aux réseaux sociaux. Les activistes ont despratiques similaires qu’ils combinent à l’organisation d’évènements publics. Les citoyensparticipent également à cet écosystème, mais de manière plus indirecte, en circulant lescontenus ou en étant invité à participer par des personnalités (politiciens ou activistes) via desévènements, des pétitions, et d’autres happenings. La combinaison de l’usage de l’ANT et dumodèle ADD permet une approche analytique des acteurs en présence dans un écosystème touten donnant au chercheur la possibilité de penser son influence sur les acteurs-réseaux étudiéset sa place au sein de ceux-ci.