Résumé : Le monde du travail connaît des changements significatifs du fait de l’introduction des « new ways of working » (NWOW, ou « nouvelles formes d’organisation du travail », NFOT). Cette étude vise à élucider la manière dont les employé·es « de bureau » donnent sens aux NWOW. Nous emprutons le concept de logique à la théorie post-structuraliste et psychanalitique lacanienne du discours (Laclau et Mouffe, 1985 ; Glynos 2008 ; Glynos et Stavrakakis, 2008) selon laquelle une logique structure la manière dont on articule des éléments sémiotiques entre eux. Nous nous appuyons en particulier sur l’élaboration des concepts de logiques sociales et fantasmatiques par Glynos et Howarth (2007). Nos questions de recherche sont : Quelles sont les logiques sociales ou interprétatives qui structurent le discours NWOW articulé par les employé·es de bureau ? De quelle manière ces logiques peuvent-elles donner des points d’appui à la critique de certains aspects des NWOW ? En quoi les logiques du discours NWOW structurent-elles la subjectivité des employé·es capables d’un certain degré de réflexivité vis-à-vis de leur sens de soi et de leurs pratiques discursives au travail ? Notre corpus consiste en des retranscriptions d’entretiens avec 29 employé·es dans huit organisations privées ou publiques belges de différentes tailles et de différents secteurs. L’analyse des entretiens met au jour les logiques interprétatives suivantes : une logique néolibérale (avec son emphase sur le management par résultats et le management de soi), une logique humanisante (avec son accent sur le bien-être au travail), une logique expressive/consultative, une logique participative (qui valorise la co-décision) appliquée au niveau de l’équipe, une logique pseudo-participative, une logique d’autorité, et une logique de service public de qualité. L’investissement affectif des employé·es dans les logiques qui structurent les pratiques discursives du NWOW est soutenu par une logique fantasmatique qui rend l’implémentation du NWOW apparemment nécessaire. Les employé·es recourent à certaines de ces logiques pour s’engager dans une critique généralement limitée du NWOW et légitimer des micro-résistances. La critique est rarement synonyme d’opposition aux NWOW et à leur raison d’être. Enfin, nous montrons comment le discours NWOW célébratoire structure la subjectivité des employé·es en construisant une opposition binaire entre un·e employé·e « idéal·e » et son contraire.