Résumé : Le cytomégalovirus (CMV) est un virus ubiquitaire établissant une infection persistante à vie chez l’hôte. L’acquisition du CMV survient lors d’une transmission verticale ou d’une transmission horizontale. Le CMV peut infecter le fœtus au cours d’une transmission materno-fœtale à travers le placenta. Il peut infecter le nouveau-né à partir du colostrum ou du lait maternel. Dans les établissements de la petite enfance (crèches ou écoles), il peut infecter les adultes lors de contacts avec les urines ou la salive des jeunes enfants ou infecter les jeunes enfants lors de contacts avec la salive des autres enfants qui sont un réservoir important du CMV. Comme les sujets adultes, ces jeunes enfants infectés par le CMV sont en général asymptomatiques mais excrètent de façon prolongée le virus dans les urines et la salive. Le CMV peut également infecter l’adolescent et l’adulte par les rapports sexuels et la transfusion sanguine. Le CMV peut aussi infecter le patient greffé d’organe solide ou de moelle osseuse (cellules souches hématopoïétiques) si le tissu du patient donneur est infecté par le CMV ou se réactiver chez le patient immunodéprimé, comme le patient transplanté ou atteint du VIH.Les mécanismes impliqués dans la transmission du CMV en général et plus particulièrement à partir de l’excrétion virale par les reins, les glandes mammaires, les glandes salivaires et le tractus génital restent incompris. Une meilleure compréhension de ces mécanismes est nécessaire au développement d’un vaccin prévenant la transmission du virus. L’objectif de ce travail était d’explorer les stratégies potentielles d’immuno-évasion du CMV au niveau de deux organes excréteurs impliqués de manière significative dans la transmission horizontale du CMV, le rein et la glande mammaire.Au cours de ces travaux, nous avons observé d’une part une séquestration des particules virales par les cellules épithéliales primaires rénales et mammaires à la membrane plasmique. Cette séquestration consiste en une rétention des particules virales à la surface cellulaire. En étant ainsi séquestré à la membrane plasmique, le CMV pourrait éviter la présentation antigénique aux cellules immunitaires effectrices et pourrait ainsi échapper partiellement à la réponse immunitaire in vivo. D’autre part, nous avons mis en évidence que l’infection par le CMV induit une augmentation de l’expression des cadhérines E et N par les cellules épithéliales. L’interaction des cellules épithéliales infectées par le CMV exprimant les cadhérines E et N avec les cellules Natural Killer exprimant le récepteur inhibiteur KLRG-1 (Killer cell lectin-like receptor subfamily G member-1) a résulté en une inhibition de leurs fonctions effectrices. En induisant une augmentation de l’expression des cadhérines E et N à la surface des cellules épithéliales infectées, le CMV pourrait échapper à son élimination par les cellules immunitaires effectrices, lymphocytes T et cellules NK, exprimant le KLRG-1, récepteur des cadhérines.Ce travail nous a donc permis d’identifier deux nouvelles stratégies d’immuno-évasion du CMV au niveau des cellules épithéliales rénales et mammaires. Ces stratégies d’échappement immun pourraient être impliquées in vivo dans l’excrétion prolongée du virus dans les urines et le lait maternel en post-partum.