Résumé : Notre thèse de doctorat s’attache à l’étude de la cosmologie du Coran à la lumière des sources cosmologiques de l’Antiquité tardive. La thématique est traitée selon trois axes principaux : 1) la contemplation naturelle du Coran ; 2) la doctrine coranique de la création ; 3) les représentations cosmologiques du Coran.Dans la première partie de ce travail de doctorat, nous étudions les nombreux passages où le Coran invite son audience à contempler les phénomènes cosmiques, appelés « signes » (āyāt), afin d’y trouver le divin. Le Coran en effet promeut la possibilité́ d’acquérir par la contemplation du cosmos une connaissance de Dieu et de son plan salvifique pour le monde et l'humanité. En ceci, nous montrons que le Coran s’inscrit dans le prolongement d'une tradition contemplative déjà présente dans le judaïsme hellénisé (par ex. Philon d’Alexandrie) et se développant chez les Pères de l'Église grecs puis syriaques. Nous avons mis en évidence les liens que le Coran entretient avec cet antique système contemplatif sur les plans structurels, thématiques, et même parfois linguistiques, tout en cherchant à cerner l’originalité du texte coranique en la matière. Notre recherche suggère que la théologie naturelle du Coran entretient des liens particulièrement étroits (correspondances structurelles, thématiques, linguistiques) avec l’une des branches chrétiennes de cette tradition, l’Église syriaque d’Orient. Dans la deuxième partie de notre travail, nous nous intéressons à la teneur du message divin que le croyant acquiert au travers cette contemplation naturelle. Ici, nous nous intéressons tout particulièrement à l’emphase mise dans le texte sur l’idée que la Création pointe par ses « signes » vers l’idée d’un unique créateur dans l’univers auquel rien n’est associé. Une série de doctrines cosmologiques supportées dans le Coran s’inscrivent en effet dans le cadre d’une défense de la doctrine de l’unicité divine. Nous indiquons comment, pour illustrer cette position théologique, le Coran puise dans un répertoire d’arguments cosmologiques bien connus de l’Antiquité tardive, notamment chrétienne. Nous notons toutefois qu’un certain nombre de doctrines cosmologiques particulièrement populaires dans la littérature chrétienne à cette époque, comme par exemple la doctrine de la création ex nihilo, ne trouvent pas d’écho direct dans le Coran en dépit de l’intérêt qu’elles auraient pu représenter pour soutenir la doctrine de l’unicité de Dieu. Ce silence invite à une réflexion sur la nature de l'influence exercée par la sphère chrétienne dans le Coran, sur la nature du texte coranique lui-même, ainsi que sur l'identité de ses auteurs.Enfin, la troisième partie de notre recherche touche aux représentations cosmologiques du Coran à proprement parler. Nous montrons comment l’imagerie cosmologique qui y est déployée est extrêmement proche de la manière dont certains auteurs chrétiens et surtout syriaques (Éphrem de Nisibe, Narsai, Jacques de Saroug, etc.), dépeignaient le monde dans les quelques siècles qui précèdent l’émergence du Coran. Toutefois, nous montrons que la cosmologie du Coran ne se laisse pas réduire à une simple reprise de traditions antérieures. Tout en témoignant de l’influence d’autres courants cosmologiques, notamment juifs, le texte coranique propose une cosmologie nouvelle et originale qui reflète la créativité des auteurs de ce texte.