Résumé : Les Gnawa sont une communauté confrérique issue de la présence subsaharienne au Maroc. Ils sont connus pour leur rituel nocturne de transes, la līla, mais aussi pour leur activité musicale incessante sur les places touristiques des villes marocaines. Cette thèse s’intéresse aux pratiques musicales des Gnawa à Bruxelles. En effet, la communauté des Marocains de Bruxelles (Maroxellois) est l’une des plus importantes de la capitale et les Gnawa en sont devenus l’une des voix audibles. Une quarantaine de musiciens sont actifs tant dans les rituels que dans les mariages, les salles de concert ou les parades.Cette thèse porte sur les mouvements des répertoires, des praticiens et praticiennes et de leurs instruments. Ces circulations ont une importance historique : d’une part, elles sont à l’origine de l’émergence de la pratique gnawa, née de la rencontre de plusieurs cultures d’Afrique subsaharienne portées par les esclaves au Maroc. D’autre part, elles sont constitutives de l’identité contemporaine des Gnawa à la fois dans leur processus d’initiation par la ǧōla et dans la construction de leur carrière professionnelle. La présence gnawa à Bruxelles soulève aussi la question des styles musicaux régionaux : au Maroc, chaque région possède un style « ancien », qui a petit à petit été remplacé par un style moderne globalisé. À Bruxelles, alors que le répertoire du luth guembri est souvent interprété dans sa version globalisée, le répertoire au tambour reste très attaché à son côté tangérois. S’appuyant sur des analyses du répertoire musico-chorégraphique, cette thèse examine comment et pourquoi les identités musicales régionales sont parfois mises en avant, parfois reléguées au second plan.Nourrie par un travail de terrain de plusieurs années mené à Bruxelles, au Maroc et dans d’autres lieux de la diaspora marocaine en Europe, cette recherche prend en compte des données de type historique, ethnomusicologique, anthropologique et sociologique. Les activités gnawa à Bruxelles sont envisagées à la fois dans une perspective transnationale, rattachées à des pratiques globalisées de par le monde mais aussi ancrées dans une localité bruxelloise spécifique qui leur fait prendre une trajectoire unique.