par Dierickx, Laurence
Président du jury Merten, Pascaline
Promoteur Domingo, David
Co-Promoteur Van Hooland, Seth
Publication Non publié, 2020-04-30
Président du jury Merten, Pascaline
Promoteur Domingo, David
Co-Promoteur Van Hooland, Seth
Publication Non publié, 2020-04-30
Thèse de doctorat
Résumé : | Le phénomène de la production automatisée d'informations, caractérisé par un processus de transformation de données structurées en textes en langage naturel ou en toute autre forme de représentation visuelle, interroge la manière dont il se développe dans le monde du journalisme. S'il peut être envisagé comme un produit fini qui sera délivré aux audiences sans médiation journalistique, cette thèse s'intéresse à son autre versant : celui d'un appui aux pratiques journalistiques. Souvent désigné par la métaphore du "robot journaliste", ce phénomène nourrit des représentations duales qui reflètent ses enjeux : tantôt abordé en termes de menace sur l'emploi, voire sur l'identité professionnelle des journalistes ; tantôt perçu comme une opportunité, dans une vision enchantée d'un journalisme en réinvention. Ceci pose la question du rapport du journaliste à l'objet technique, dès lors que celui-ci est conçu comme un outil qui lui fera gagner du temps dans ses routines, ou qui se posera en tant que source d'information s'ajoutant à un arsenal existant. Les objectifs de cette thèse sont de comprendre les mécanismes de structuration des usages professionnels dans le contexte de la production automatisée d'informations, d'identifier les sources de résistance qui ne permettent pas de réaliser ces usages et, partant, de contribuer à une meilleure compréhension d'une relation homme-machine placée sous tension. Considérant que l'on ne peut faire usage d'une technologie sans se la représenter, de quelle manière les représentations sociales et les pratiques culturelles des journalistes vont-elles participer à la structuration des usages (et des non-usages) d'artefacts de la production automatisée d'informations lorsque ceux-ci sont envisagés en tant qu'outils du journalisme ? Cette question de recherche a été envisagée selon deux hypothèses : celle de l'impact de la métaphore du "robot" quant à des résistances contre l'intégration de l'objet dans les routines professionnelles, et celle de l'adéquation des productions matérielles de l'artefact avec les savoir-faire et exigences journalistiques. L'analyse mise en oeuvre s'appuie sur les cadres conceptuels et théoriques proposés par le modèle SCOT (Social Construction Of Technology) et l'école française de la sociologie des usages. Elle s'est déployée dans le cadre d'une étude empirique menée dans deux rédactions en Belgique francophone, lesquelles se distinguent tant par leur culture professionnelle que par leur structure organisationnelle. Dans ces deux expériences, il s'agissait de suivre le processus d'une construction sociotechnique qui a activement impliqué les journalistes dans la conception des artefacts. Bien que cette première forme d'usage ne garantisse pas des usages finaux, elle pose les premiers jalons d'usages d'adoption. Les résistances observées ne sont pas nécessairement liées à la nature de l'objet technique. Elles sont également à trouver dans un manque d'intérêt envers le domaine d'application, une forme de technophobie, un manque d'appétence pour une approche par données dans le journalisme, une mise en cause du management et de l'organisation, ou encore dans une représentation duale induite par la métaphore du robot. Le mécanisme de structuration des usages va donc relever d'un processus complexe dépendant à la fois de facteurs endogènes, liés au contexte organisationnel et aux routines journalistiques, et de facteurs exogènes, liés aux cadres plus larges de l'imaginaire technologique et de la relation homme-machine. |
ABSTRACT The phenomenon of news automation, characterized by the process of transformation of structured data into texts in natural language or any other form of visual representation, asks the question about how it is integrated within newsrooms. If it can be considered as a finished product that will be delivered to audiences without journalistic mediation, this thesis is interested in its aspect related to the support of journalistic practices. Often associated with the metaphor of the "robot journalist," news automation encourages dual representations that reflect its challenges: either a threat against employment and professional identity or an opportunity through an enchanted vision of the reinvention of journalism. This thesis explores how journalists tackle this new form of relationship as an artefact, as a tool, that is supposed to free them from repetitive and time-consuming tasks or to provide them an additional source of information. The aims of this research project are, therefore, to understand how it will shape new professional uses, to identify the causes of resistance that could lead to non-uses, and to contribute to a better understanding of a man-machine relationship developed under tension. Considering that one cannot make use of a given technology without representing it, how will the social representations and cultural practices of journalists contribute to shaping the uses (and the non-uses) of news automation software when it is considered as a journalistic tool? This research question was examined according to two hypotheses: that of the impact of the robot metaphor, and that of the adequacy of the material productions of the artefact with journalistic know-how and requirements. The analysis is based on conceptual and theoretical frameworks proposed by the SCOT model (Social Construction of Technology) and by the French school of the sociology of uses. It is approached through an empirical study conducted within two newsrooms in French-speaking Belgium, which are radically different both in their professional culture and in their organizational structure. In these two experiences, we have followed the process of a socio-technical construction which involved journalists in the design process. Although this first form of use does not guarantee the end-use of the two automation artefacts, it does lay the groundwork for adoption. The reasons to explain the observed resistances are not necessarily related to the nature of the object. They are also to be found in a lack of interest, a form of technophobia, a lack of appetite for a data-driven approach, a questioning of the management, or the dual representation induced by the robot metaphor. The mechanism for structuring the use will, therefore, be developed through a complex process shaped by both endogenous factors linked to the organizational context and journalistic routines, and exogenous factors related to the broader frameworks of the technological imaginaries and the man-machine relationship. |