Résumé : L’objectif de cette thèse est d’éclaircir les connaissances actuelles sur l’architecture des oppida de l'Europe tempérée au cours des deux derniers siècles avant notre ère à partir d’un site, l’oppidum de Bibracte (mont Beuvray, Bourgogne), qui compte parmi les contextes de référence pour la période à l’échelle européenne. La recherche s’est focalisée principalement sur l'étude des techniques de construction impliquant l'utilisation majoritaire du bois, qui constitue le matériau principal dans l’architecture de ces agglomérations issue de la tradition protohistorique européenne. L’analyse a nécessité la prise en compte du processus global du travail du bois, de l’approvisionnement en forêt aux différentes étapes de la mise en œuvre des bâtiments. Les aspects techniques liés à la fondation et à l’élévation des ossatures, au choix et à la mise en forme de leurs éléments constitutifs, en passant par les modes de cloisonnement des parois et d’édification des toitures, ont été appréhendés à travers l’analyse des traces archéologiques – souvent fragmentaires et difficilement lisibles – laissées par ces édifices, ainsi que par l’étude des rares bois d’œuvre conservés sur le site en conditions taphonomiques particulières. Le recoupement de l’abondante documentation disponible issue des 75 ans de recherches menées sur le mont Beuvray au XIXe siècle (1864-1907) et à partir de 1984 jusqu’à nos jours, a permis de reconnaître 151 structures d’habitat aux plans suffisamment complets. Parmi celles-ci, 74 bâtiments en ossature en bois peuvent être considérés comme caractéristiques d’une tradition architecturale indigène, tandis que 77 édifices employant la maçonnerie présentent des influences plus ou moins marquées liées aux nouvelles techniques et modèles architecturaux italiques introduits progressivement dans l’habitat de l’oppidum durant les deux dernières décennies du Ier siècle av. n. è. L’architecture en bois de Bibracte renvoie l’image d’un savoir-faire maitrisé et particulièrement bien adapté aux caractéristiques morphologiques très contraignantes du terrain du mont Beuvray. Le corpus des bâtiments étudiés se compose de 13 catégories architecturales (dont 6 qui concernent les édifices à ossature en bois). Dans les secteurs aux versants plus abrupts, on retrouve des édifices composés d’une ou plusieurs pièces semi-enterrées qui forment un habitat organisé en terrasses. Le volume habitable de ces bâtiments se développe plutôt à la verticale, avec des emprises au sol limitées (les portées excédant rarement 5 m, les structures ne nécessitent aucun système porteur interne), mais dotées d’ossatures massives. Ces dernières sont construites au moyen de poteaux équarris à entraxe serrée, installés dans des tranchées comblées de pierres sèches ou reliés par des poutres sablières de fondation, ce qui donne aux ossatures une portance remarquable, capable de soutenir le poids d’un étage. Dans les secteurs moins pentus, les bâtiments se développent davantage à l’horizontale, avec de plans composés de plusieurs pièces et souvent dotés de caves à ossature en bois ou des édifices publics au caractère monumental. Bien qu’elles présentent des organisations diverses, plusieurs structures affichent une certaine uniformité dans leurs dimensions, ce qui suggère l’emploi de modules de construction constants et d’un véritable système de mesure, au sein d’une activité de construction au caractère standardisé. Comme pour l’habitat, l’existence de paramètres de construction bien définis a pu être également observée pour les remparts à armature en bois (murus gallicus) de l’oppidum, ainsi que pour le bois d’œuvre conservé sur le site.