Thèse de doctorat
Résumé : Adoptant la langue des flux et des fluides, la théorie sociologique caractérisent aujourd’hui les acteurs sociaux comme des êtres composites, prédisposés à changer et capables d’agencements feuilletés. Alors que l’importance de la mobilité pour penser et analyser le social contemporain est généralement reconnue, rare sont les travaux qui se consacre à en développer les modalités fondamentales. L’objectif de cette thèse est de développer une approche plus différenciée et gradualiste des mobilités que celle proposée par les principales options théoriques en vigueur, sans pour autant abandonner la dimension fluctuante, non linéaire et imprévisible du mouvement sur laquelle elles attirent l’attention. Qu’est-ce qu’être mobile ? Une théorie de l’expérience, en l’occurrence celle proposée par la phénoménologie, offrirait-elle des ressources critiques susceptibles d’ouvrir à l’approfondissement des mobilités comme elles sont vécues ? À titre d’hypothèse, cette thèse pose qu’un ensemble de phénomènes demeurent énigmatiques à l’intérieur de la conception généralement admise du social contemporain et qu’une articulation plus explicite du thème de la mobilité à celui de l’action humaine permet d’approfondir les processus du déplacement dans l’espace des sociétés, du passage du temps impliqué par le déplacement et du changement social. Comment émerge du nouveau dans le cours d’actions ? Qu’est-ce que pouvoir agir ? Quelle est la source du changement ? À partir d’une enquête inédite sur des voyageurs se rendant quotidiennement à Bruxelles et des personnages de romans de route étatsuniens, l’auteur explore des questions de fond portant sur l’expérience du transport, autour de l’éloignement des choses et des personnes aimées, du vide du temps d’attente, des aléas aussi insignifiants qu’irritants, de l’étrangeté des rencontres, de la décision de prendre la route et de choisir une orientation nouvelle. Ces moments de vacillation sont importants, soutient l’auteur, car ils nous ramènent aux motivations fondamentales et aux buts ultimes de nos déplacements les plus quotidiens. À une époque marquée par un idéal de mouvement fluide et sans accrocs, cette thèse éclaire ce qui se passe dans l’expérience des mobilités. Elle incite à une réflexion sur ce que nous éprouvons sur la route et aux possibles que cette expérience fait émerger.