Résumé : À partir d’une base de données de plus de 13 000 résultats de vente de tableaux flamands (XVe-XVIe siècles), l’objectif de la recherche est d’analyser la réception marchande du nom d’artiste, et la façon dont les différentes stratégies d’identification exploitées pour conférer une identité aux tableaux anciens affectent la propension à payer des acheteurs. Après une introduction à la problématique du nom d’artiste et sa réception critique dans différents domaines de recherche (linguistique, histoire de l’art, sciences cognitives, marketing, économie), la création d’un indice des prix permet de retracer pour la première fois l’évolution du marché de la peinture flamande entre 1946 et 2015, et de procéder à l’identification des principales variables intervenant dans la formation des prix. Un premier volet est consacré au marché des tableaux déterminés, pour lesquels le nom de l’artiste est connu. Successivement sont envisagés les marchés des œuvres autographes (noms de marque historiques), de Pieter II Brueghel (nom de marque premium) et des œuvres de collaboration (co-branding). Le second volet porte sur le marché des tableaux indéterminés, soit des biens pour lesquels l’identité de l’artiste demeure inconnue. Les différentes alternatives nominales de l’échantillon font l’objet d’études de cas approfondies, portant successivement sur l’économie des degrés d’attribution (noms indirects), les maîtres à noms de convention (noms fictifs) et les désignations spatio-temporelles. La question des réattributions est envisagée dans un dernier temps (rebranding). La principale contribution de cette étude est de démontrer que sur le marché de l’art ancien, non seulement les noms historiques importent, mais également les multiples alternatives nominales utilisées par les parties prenantes des champs savant et marchand pour labelliser les œuvres indéterminées. Noms indirects, noms provisoires et désignations spatio-temporelles fonctionnent comme des labels qui participent à la création de valeur autour des tableaux flamands. Ces stratégies d’identification réduisent significativement l’incertitude et l’asymétrie d’information qui pèsent sur l’identité de l’artiste et/ou les origines de l’œuvre, tout en affectant différemment les prix de vente en fonction du degré d’information véhiculé et de son efficacité. Du point de vue du marché, toute œuvre d’art peut ainsi être perçue comme un agrégat d’informations, parfois plus estimé que l’objet physique per se.