Résumé : Les évolutions de la condition féminine ont profondément interpellé le monde catholique belge, et offrent un point d’entrée fructueux pour appréhender les transformations qu’il a connues entre 1960 et 1990. J’ai choisi d’aborder cette question par le biais de quatre organisations d’encadrement des couples ou des femmes catholiques, qui ont développé des idées et/ou des pratiques d’émancipation touchant les femmes, entrant parfois en contradiction avec le Magistère : la Ligue Ouvrière Féminine Chrétienne (LOFC), devenue Vie Féminine, l’Action catholique Rurale des Femmes (ACRF), le Centre National de Pastorale Familiale (CNPF) devenu Centre d’Éducation à la Famille et à l’Amour (CEFA), et la revue Feuilles Familiales. En combinant les théories de la sécularisation proposées par la sociologie des religions, et une analyse de genre, l’objectif de ma recherche est à la fois d’éclairer sous en jour nouveau les processus de l’émancipation féminine, et de comprendre les mécanismes de l’appartenance catholique et son devenir contemporain. À travers l’étude des multiples aspects de l’émancipation des femmes, regroupés en quatre thématiques (la conquête des droits reproductifs, l’égalité économique et professionnelle, la citoyenneté politique et la place des femmes dans l’Église), la plasticité idéologique des organisations d’Action catholique et leur longévité suggère que leur fonction première n’est pas tant d’imposer des contenus que d’encadrer efficacement un grand nombre de femmes. Le principal enjeu, pour ces organisations, semble être d’assurer la coexistence en leur sein d’une multiplicité d’opinions. Elles sont ainsi parvenues à faire accepter à la majorité de leurs membres des positions radicalement opposées à celles du Magistère catholique, comme la dépénalisation partielle de l’avortement (1989) tout en maintenant une identité « catholique », qui se manifeste dans un socle de valeurs commun à l’entièreté du pilier catholique, mais qui n’est plus tributaire de l’approbation du clergé.