Résumé : En cas de lymphopénie -diminution du nombre de lymphocytes T (LT) présents en périphérie-, les LT restants prolifèrent. Ce processus, dit de prolifération homéostatique, est régulé par la disponibilité de la cytokine IL-7 ainsi que par des interactions TcR/MHC et mène à la différenciation de LT effecteurs/mémoires. La prolifération homéostatique peut augmenter l’efficacité des immunothérapies anti-cancéreuses ou avoir des conséquences délétères pour l’organisme (réaction du greffon contre l’hôte, auto-immunité). Les LT naïfs, effecteurs et de mémoire produisent leur énergie via des mécanismes différents et la capacité des lymphocytes à enclencher le programme métabolique adéquat au bon moment joue un rôle essentiel dans leur différenciation. En outre, l’inhibition de la glycolyse ou de la respiration mitochondriale altère la prolifération homéostatique, suggérant que ces deux voies métaboliques sont importantes dans ce processus. Les mécanismes par lesquels les LT accroissent leur métabolisme énergétique lors de la prolifération homéostatique ne sont, à ce jour, pas encore élucidés. L’AMPK est un régulateur essentiel du métabolisme cellulaire et est la cible de différents composés déjà utilisés chez l’homme. L’objectif de notre travail a été de déterminer les conséquences de l’absence d’AMPK sur la capacité des LT à proliférer de manière homéostatique et à adapter leur métabolisme en réponse à l’IL-7. Notre hypothèse a été que l’AMPK, en permettant de réorienter le métabolisme des LT, jouerait un rôle important dans le processus de prolifération homéostatique. Au cours de ce travail, nous avons démontré que l’AMPK favorise la prolifération homéostatique des LT ainsi que l’acquisition des fonctions effectrices de type Th1. Nos résultats mettent également en évidence un rôle de l’AMPK dans le processus de graft-versus-host disease (GVHD). En effet, les LT déficients pour l’AMPK induisent une GVHD de moindre gravité. D’un point de vue métabolique, nous avons montré que les LT déficients pour l’AMPK présentent un potentiel de membrane mitochondriale réduit ainsi qu’une sensibilité accrue aux dérivés réactifs de l’oxygène (ROS). Les LT déficients pour l’AMPK ont, de plus, un défaut de switch glycolytique lors de stress mitochondriaux ainsi que lors d’une stimulation secondaire en présence d’anticorps anti-CD3/anti-CD28. Une réduction de la toxicité des ROS, associée à une plus grande flexibilité énergétique, pourrait conférer un avantage prolifératif aux LT soumis à des stimuli antigéniques de faibles affinités, tels que rencontrés lors de proliférations induites par la lymphopénie. Nos résultats suggèrent également qu’une régulation fine du métabolisme pourrait réduire la sévérité de la GVHD.