Résumé : Faced with the decline of the totalizing reason –great protagonist of the modern times– as we experience the fruits of the so-called "dialectic of the Enlightenment", the common point of all those who engage in the adventure of thinking is the crisis of identity, the test of difference. The anxiety we all feel indistinctly seems to be that of otherness. Indeed, if the "I," the world of identity both on the subjective and the absolute levels, is a vector of modernity, the question of the insurgent and upsetting postmodernity is about the other, whose dignity must be promoted. The unsettled nature of the other must be radicalized, reasonable, and autonomous, respecting and protecting his rights. E. Levinas understood and took the matter to heart by participating in the work of transforming the metaphysical question into an ethical question, by passing from the question of being to that of the other, and recognizing in the splendor of the face of others the unequivocal denunciation of the hyperbolic subjectivity. It is an important and fundamental thing, especially in Africa, to constantly renew ourselves, by his philosophy, with the outburst of this beginning, namely the responsibility for others, constitutive of the subject.Faced with the decline of the totalizing reason –great protagonist of the modern times– as we experience the fruits of the so-called "dialectic of the Enlightenment", the common point of all those who engage in the adventure of thinking is the crisis of identity, the test of difference. The anxiety we all feel indistinctly seems to be that of otherness. Indeed, if the "I," the world of identity both on the subjective and the absolute levels, is a vector of modernity, the question of the insurgent and upsetting postmodernity is about the other, whose dignity must be promoted. The unsettled nature of the other must be radicalized, reasonable, and autonomous, respecting and protecting his rights. E. Levinas understood and took the matter to heart by participating in the work of transforming the metaphysical question into an ethical question, by passing from the question of being to that of the other, and recognizing in the splendor of the face of others the unequivocal denunciation of the hyperbolic subjectivity. It is an important and fundamental thing, especially in Africa, to constantly renew ourselves, by his philosophy, with the outburst of this beginning, namely the responsibility for others, constitutive of the subject.Moreover, despite the difference of perspectives and the variation of harmonics, we have chosen to deepen the notion of responsibility by also drawing on two other leading-figures of contemporary philosophy.First, on Hans Jonas, who understands moral responsibility, which he calls natural, from the idea of the intrinsic value of living beings and from the example of the infant: to see an infant is to perceive the need to take care of it. The moral obligation is imposed here also asymmetrically, since it cannot be inscribed under the register of reciprocity. What gives the opportunity to grasp new dimensions of our freedom is the fact that the ethical requirement does not require, as E. Levinas recommends, to break with the ontology but with the appropriating obsession of the same. The responsibility remains, certainly, vertical, but rests on the freedom of the subject, because the subject is free, he can harm, he has the choice, he is responsible for the consequences of his action on the collective level. Second, Hannah Arendt. It is not without thinking of the political dimension as an area of effectiveness guarantee, promotion and protection of Human Rights, that Hannah Arendt is here summoned to the debate, under the illuminating pretext of her enigmatic and emblematic formula of the "right to have rights". Highlighting the political space as a place for expressing plurality, consultation, and public recognition of individual differences, she insists on the importance of thought and judgment in the search for moral norms. Indeed, if the understanding of power that she proposes to us is deeply original, her writings throw strong light on the phenomena of violence, and constitute a precious contribution for all those who do not take their share in the violence in our societies, and strive for a negotiated, concerted, and non-violent resolution of conflicts inherent in all social and political life. Refusing to define power as the dominion of man over man, and refusing to see in violence the most obvious manifestation of power, such is an original thought, which opens on the responsibility for the world and could not fail to intrigue our questioning. Following her footsteps, and in line with many other philosophers, this dissertation questions the politics that make Human Rights, not the object of a dream to cherish, but that of actual realities, discernible in the existential experience of people.Two perspectives concretize the ambition and commitment of this study: the first postulates an environment of quality by analyzing the very current ecological questioning and the requirement to rethink our responsibility and to standardize our action in relation to nature and the living, while the second relates to the vexata quaestio of the rights of the child through the examination of the drama of "street children" in Kinshasa, DRC
Droits de l’Homme et responsabilité pour autrui. De la radicalisation levinassienne aux perspectives jonassienne et arendtienne, inaugure est une ligne de recherche qui vise le réexamen de l’éthique de responsabilité pour autrui, au bénéfice d’une intelligence renouvelée des prérogatives reconnues à la personne humaine en raison de sa dignité. Son ambition vise résolument à rendre plausible l’hypothèse selon laquelle l’approche levinassienne des Droits de l’Homme, examinée sous le prisme de la responsabilité pour autrui permet de renforcer la connaissance, le respect, la consolidation et la promotion de ces droits. Mais, elle pose aussi la nécessité d’un cadre politique, car pour E. Levinas, le combat des Droits de l’Homme est finalement la seule tâche concrète assignée à la philosophie en son second mouvement : être la mauvaise conscience du politique, l’écharde dans la chair de ses institutions. Vigilance constante d’une philosophie qui doit toujours rappeler à l’État qu’il n’est que dérivé de la socialité éthique, qui doit sans cesse critiquer et justifier ses lois pour trouver, sous leur nécessaire formalisme, la signification ultime, l’un-pour-l’autre de la responsabilité. Cette ligne de recherche considère également que l’effectivité des Droits de l’Homme ne tient pas en la nature contraignante de leur énoncé ou à leur origine divine ou naturelle, mais plutôt dans et par le cadre politique qui a vocation à les mettre en œuvre. Il y a ici nécessité d’actes nouveaux de pensée qui prennent à bras le corps les questions fondamentales d’élargissement et d’approfondissement du sens de notre responsabilité et de notre engagement par rapport à l’autre. Face au déclin de la raison totalisante, grande protagoniste des temps modernes, dans l’expérience des fruits de ce qu’il est convenu d’appeler « la dialectique des Lumières », le point commun de tous ceux qui vivent l’aventure de la pensée est la crise de l’identité, l’épreuve de la différence. L’inquiétude que nous éprouvons tous indistinctement nous semble celle de l’altérité. En effet, si le "je," le monde de l’identité tant du côté subjectif que du côté absolu, est vecteur de la modernité, la question de la postmodernité insurgée et inquiète est l’autre, dont il faut promouvoir la dignité, radicaliser la nature non-fixée, raisonnable et autonome en respectant et en protégeant ses droits. E. Levinas l’a compris et assumé en participant au labeur de transformation de la question métaphysique en question éthique, en passant de la question de l’être à celle de l’autre, et en reconnaissant dans la splendeur du visage d’autrui la dénonciation sans équivoque de la subjectivité hyperbolique. C’est chose importante et fondamentale, surtout en Afrique, que de nous reconduire constamment, par sa philosophie, au jaillissement de ce commencement, à savoir la responsabilité pour autrui, constitutive du sujet. Par ailleurs, en dépit de la différence de perspectives et de la variation d’harmoniques, nous avons choisi d’approfondir la notion de responsabilité en prenant aussi appui sur deux autres coryphées de la philosophie contemporaine. D’abord, sur Hans Jonas qui pense la responsabilité morale, qu’il nomme naturelle, à partir de l’idée de la valeur intrinsèque des êtres vivants et à partir de l’exemple du nourrisson : voir un nourrisson, c’est percevoir la nécessité d’en prendre soin. L’obligation morale s’impose là aussi de manière asymétrique, puisqu’elle ne peut s’inscrire sous le registre de la réciprocité. Que l’exigence éthique ne requiert pas, ainsi que le préconise E. Levinas, de rompre avec l’ontologie mais avec l’obsession appropriante du même ; que la responsabilité demeure, certes, verticale, mais repose sur la liberté du sujet, parce que le sujet est libre, parce qu’il peut nuire et qu’il a le choix, qu’il est responsable des conséquences de son agir au plan collectif, voilà qui donne à saisir les nouvelles dimensions de notre liberté.Ensuite, et ce, non sans penser à la dimension politique comme espace de garantie d’effectivité, de promotion et de protection des Droits de l’Homme, que Hannah Arendt est ici convoquée au débat, sous le prétexte éclairant de sa formule à la fois énigmatique et emblématique du « droit d’avoir des droits ». Mettant en avant l’espace politique comme lieu d’expression de la pluralité, de la concertation, et de la reconnaissance publique des différences individuelles, elle insiste sur l’importance de la pensée et du jugement dans la recherche des normes morales. En effet, si la compréhension du pouvoir qu’elle nous propose est profondément originale, ses écrits jettent une vive lumière sur les phénomènes de la violence, et constituent une contribution précieuse pour tous ceux qui ne prennent pas leur parti des violences de nos sociétés, et s’efforcent d’œuvrer à un traitement négocié, concerté, non-violent, des conflits inhérents à toute vie sociale et politique. Refuser de définir le pouvoir comme domination de l’homme sur l’homme et refuser de voir dans la violence la manifestation la plus évidente du pouvoir : voilà une pensée originale, qui ouvre sur la responsabilité pour le monde et n’a pu manquer d’intérêt pour notre questionnement. A sa suite et avec tant d’autres philosophes, la thèse s’interroge sur la voie d’une politique qui fasse des Droits de l’Homme, non l’objet d’un rêve à caresser, mais celui des réalités effectives et discernables dans l’expérience existentielle des peuples. Deux perspectives concrétisent l’ambition et engagement de cette étude: la première postule un environnement de qualité en analysant la très actuelle interrogation écologique et l’exigence de repenser notre responsabilité et de normer notre agir par rapport à la nature et au vivant, tandis que la seconde se rapporte à la vexata quaestio des droits de l’enfant à travers l’examen de la dramaturgie des « enfants des rues » à Kinshasa, en RDCongo.