Résumé : Après les attentats de Paris du 13 novembre 2015, certains États européens se sont prévalus de la légitime défense pour justifier des frappes contre l’« État islamique » en Syrie, sans même chercher à obtenir le consentement du gouver- nement de ce pays. Selon les États européens, de telles frappes ne viseraient que le groupe terroriste, et non la Syrie, et ne seraient donc pas contraires à la souve- raineté de cet État. Une telle position est difficilement compatible avec le droit international existant, lequel envisage tout franchissement des frontières d’un État contre son consentement comme un recours à la force en principe prohibé. Une autre possibilité serait de mettre en cause la responsabilité de l’État syrien lui-même, en application d’un « unwilling or unable test », mais cela s’avère déli- cat au vu des combats qui se poursuivent depuis des années entre les forces de l’E.I. et les autorités de Damas, lesquelles sont par ailleurs prêtes à consentir à des interventions militaires étrangères. Si l’on se penche ensuite sur les positions exprimées au sujet de cette crise depuis le début de l’année 2014, spécialement au sein des Nations Unies, le scepticisme prévaut. Les ambiguïtés pèsent en effet non seulement sur l’opinio juris des États intervenants eux-mêmes mais aussi, plus généralement, sur la position de la communauté internationale des États dans son ensemble. L’impression qui domine est plutôt celle de la versatilité, dans un contexte davantage marqué par le pragmatisme politique que par la finesse de l’argumentation juridique. Cependant, au-delà du précédent syrien, il faut souligner que la majorité des États ont affirmé que l’article 51 de la Charte ne devrait être ni réécrit ni réinterprété.