Résumé : La reprogrammation métabolique est un événement critique dans la fonction et la différenciation des lymphocytes T. Les lymphocytes T quiescents reposent principalement sur la phosphorylation oxydative qui leur permet de produire de grandes quantités d’énergie. Cependant, après activation antigénique, les lymphocytes T subissent une reprogrammation métabolique caractérisée par une augmentation de la glycolyse. Cette situation unique permet aux lymphocytes T activés de diriger rapidement les intermédiaires métaboliques vers la synthèse de macromolécules requises pour leur prolifération et leur fonction effectrice. Néanmoins, l’exposition à un antigène persistant modifie très fortement la fonction lymphocytaire. Les lymphocytes T CD4+ stimulés chroniquement développent un état de non-réponse caractérisé par une perte apparente de leur capacité proliférative et de leurs fonctions effectrices. Le récepteur inhibiteur PD-1 (Programmed cell Death-1) a été identifié comme un régulateur majeur de cet état de non-réponse. L’objectif de notre travail a été de caractériser le métabolisme énergétique des lymphocytes T CD4+ stimulés chroniquement par un antigène. Nous avons, pour cela, développé un modèle murin d’exposition antigénique chronique dans lequel des lymphocytes T CD4+ anti-mâle de souris femelles sont adoptivement transférés dans des receveurs mâles. L’analyse du profil protéomique des lymphocytes T anti-mâle stimulés chroniquement par leur antigène a montré que plusieurs enzymes impliquées dans le métabolisme cellulaire étaient sous-exprimées par ces cellules en comparaison avec des cellules naïves. Nous avons ensuite montré que ces lymphocytes T stimulés chroniquement présentaient un flux glycolytique bas et une capacité respiratoire limitée comparativement à des lymphocytes T effecteurs. De plus, l'expression du transporteur de glucose GLUT1 ainsi que la masse mitochondriale étaient réduites dans ces lymphocytes T CD4+ stimulés chroniquement. Suite à leur activation, ces cellules présentaient une capture de glucose et une synthèse d’ATP limitées. Le blocage de la voie inhibitrice PD-1/PD-L1 a permis de restaurer rapidement la fonction effectrice, et en particulier la sécrétion d’interféron gamma, des lymphocytes T CD4+ soumis à une stimulation antigénique chronique. Cependant, ce blocage n’a induit aucune reprogrammation métabolique en faveur de la glycolyse aérobique dans ces cellules. Par contre, l'absence de régulation médiée par PD-1 a entraîné une perturbation de la chaîne mitochondriale de transport des électrons, une augmentation de la production de superoxyde mitochondrial et une réduction de la survie et de la capacité effectrice des lymphocytes T CD4+ exposés à un antigène persistant. En conclusion, nos observations démontrent que l'inhibition médiée par PD-1 limite la production de superoxyde mitochondrial dans les lymphocytes T CD4+ stimulés chroniquement, améliorant ainsi leur viabilité et leur capacité à développer des fonctions effectrices.