Résumé : Shigella est une bactérie pathogène à Gram-négatif qui cause la shigellose ou dysenterie bacillaire. Cette maladie est une cause importante de morbidité chez les jeunes enfants et les adultes dans les pays en développement, avec presqu’un million de morts par an. Jusqu'à ce jour, aucun vaccin efficace contre Shigella n’est disponible et la prévalence croissante de souches multirésistantes fait de Shigella une menace importante en termes de santé publique. La virulence de Shigella est médiée par la sécrétion d'un arsenal de protéines (effecteurs) capables d'interférer avec diverses voies de signalisations de la cellule hôte. La sécrétion de effecteurs dépend d'un système de sécrétion de type 3 (SST3), véritable aiguille moléculaire assemblée à la surface bactérienne permettant l’injection les protéines de virulence dans le cytoplasme de la cellule hôte. Le SST3 est assemblé à 37 °C et est composé de trois parties distinctes: i) un bulbe cytoplasmique, ii) un corps basal et ii) une aiguille extracellulaire. Cette dernière est constituée de l’assemblage d’une centaine de copies de la protéine MxiH pour la partie extracellulaire et de plusieurs copies de la protéine MxiI pour la partie périplasmique. Avant le contact cellulaire, le SST3 est maintenu dans un état "OFF" d’une part, par un complexe de protéines (IpaD et IpaB) localisé au sommet de l’aiguille et, d’autre part par une protéine (MxiC) probablement située à la base du SST3 via son interaction avec MxiI. Suite au contact cellulaire, le SST3 est activé et permet la sécrétion d’IpaC, protéine hydrophobe formant, avec IpaB, un pore dans la membrane de la cellule hôte pour permettre la translocation des effecteurs. Suite à la détection du contact cellulaire par le complexe d’extrémité (IpaB et IpaD), un signal est transmit jusqu’à la base de l’aiguille afin d’activer la sécrétion de MxiC et finalement celle des effecteurs. Des études mutationnelles ont montré que la transmission du signal d'activation du haut vers la base de l’aiguille implique les sous-unités de l’aiguille MxiH et MxiI. Ce signal permet la dissociation de MxiC et MxiI et donc la libération des effecteurs. Dans ce travail, nous avons caractérisé le rôle de MxiI dans la transmission du signal d'activation de la sécrétion via une série de mutations dirigées et aléatoires et déterminé le domaine responsable de son interaction avec MxiC. D'autre part, nous avons mis en évidence un lien entre la sécrétion de MxiC par le SST3 et celle d'un effecteur, IcsB. IcsB nécessite une protéine chaperon, IpgA, pour sa stabilité et sa sécrétion. Une fois sécrétée, elle joue différentes fonctions dans la cellule hôte et notamment, permet l’échappement de Shigella à l’autophagie. Dans ce travail, nous avons montré que IcsB est capable de lier le cholestérol et que cette liaison est nécessaire pour l’échappement de de la bactérie à l’autophagie. Nous avons montré, en utilisant des approches biochimiques, qu’IcsB pourrait avoir une activité de type cystéine protéase via une diade catalytique conservée (C306 et H145). Nous avons identifié de nouveaux partenaires d'interaction d’IcsB, tels que OspB et VirA, ce qui pourrait permettre de mieux comprendre la fonction d’IcsB dans la cellule. En conclusion, ce travail a permis de mieux comprendre le mécanisme d'activation du SS T3 ainsi que la fonction de l'effecteur IcsB dans la virulence de Shigella.