Résumé : La thérapie cellulaire régénératrice permet de soigner un organe ou un tissu lésé par la transplantation de cellules saines isolées chez le patient ou un donneur sain. Les cellules transplantées se substitueront aux cellules défaillantes et régénéreront le tissu endommagé.Les cellules stromales mésenchymateuses (MSC) utilisées dans le cadre de la thérapie cellulaire sont amplifiées par culture ex vivo avant leur implantation chez le patient. Cette étape requiert la présence de facteurs de croissance généralement apportés par l’ajout de sérum, souvent d’origine animale (sérum fœtal bovin [FBS]), au milieu de culture. L’origine animale du FBS pose de nombreux problèmes de biosécurité. En effet, le risque de contamination du FBS par des virus et/ou des prions n’est pas négligeable et des anticorps dirigés contre les protéines animales ont été mis en évidence dans le sérum de certains patients transplantés. La mise au point de milieux de culture dépourvus de sérum mais préservant la viabilité et les fonctions des cellules représente dès lors un enjeu important.Au cours de ce travail, nous avons étudié les effets de la privation en sérum sur la viabilité de MSC isolées à partir de moelle osseuse humaine et des cellules SaOS-2, une lignée cellulaire ostéoblastique. Dans ces cellules, la carence en sérum inhibe les voies de signalisation MAPK ERK1/2, p38 MAPK ainsi que la voie de la PKB et favorise l’expression et l’activation des membres pro-apoptotiques de la famille des Bcl-2. In fine, elle conduit à l’activation des caspases-3/7 et à l’apoptose. Les MSC présentent toutefois une certaine tolérance à la privation en sérum.Nous avons ensuite évalué l’action de deux facteurs, le Glucose-dependent Insulinotropic Peptide (GIP) et l’adénosine triphosphate (ATP) sur les effets délétères et la mortalité induits par la carence en sérum. En effet, dans d’autres types cellulaires, le GIP et l’ATP exercent une action anti-apoptotique en réponse à différents stress cellulaires dont la privation en sérum.Après avoir vérifié la présence et la fonctionnalité du récepteur au GIP (GIPR) dans les MSC humaines ainsi que dans les cellules SaOS-2, nous avons montré que le GIP diminue de moitié la mortalité cellulaire et l’activation des caspases-3/7 observées dans les MSC carencées en sérum. L’utilisation de la forskoline et d’un inhibiteur spécifique de l’adénylate cyclase nous a permis de montrer que l’effet protecteur du GIP nécessite l’activation de la voie de l’adénylate cyclase et l’accumulation d’AMPc intracellulaire. Le GIP est cependant sans effet sur les voies de signalisation MAPK ERK1/2, p38 MAPK et PKB.L’expression des différents membres de la famille des récepteurs purinergiques avait déjà été documentée dans les MSC humaines. Nos résultats ont montré que l’ATP protège partiellement les MSC et les cellules SaOS-2 de la mort cellulaire provoquée par la culture en absence de sérum. De manière intéressante, nous avons observé que le nucléotide abolit l’activation des caspases-3/7. La présence d’ATP permet également de restaurer l’activité des MAPK ERK1/2 et p38 MAPK. Le nucléotide ne module pas la voie de signalisation de la PKB. Ensuite, nous avons confirmé l’implication des différentes voies de signalisation MAPK ERK1/2 et p38 MAPK grâce à l’utilisation de PD0325901, un inhibiteur des MEK1/2, et de SB203580, un inhibiteur de l’activité de la p38 MAPK. Ces deux inhibiteurs contrecarrent l’effet protecteur de l’ATP sur la viabilité des MSC. En outre, à l’instar du GIP, l’ATP entraine une augmentation de l’AMPc intracellulaire, probablement via l’activation du récepteur P2Y11. Cette accumulation d’AMPc participe à l’effet protecteur de l’ATP. L’ajout d’ATP dans le milieu de culture sans sérum module également l’expression des membres de la famille des Bcl-2 dont, notamment, mcl-1 qui code pour une protéine anti-apoptotique, et puma et bmf, deux gènes codant pour des protéines pro-apoptotiques. L’ATP inhibe l’activité de la protéine pro-apoptotique Bad en prévenant sa déphosphorylation.Enfin, nous avons montré que les MSC carencées en sérum libèrent de l’ATP dans le milieu extracellulaire à des concentrations 10 fois supérieures à celles mesurées dans des conditions de culture standards (10% FBS). Ceci pourrait représenter un mécanisme intrinsèque de protection contre la mort cellulaire. En conclusion, nous avons montré que le GIP et l’ATP protègent les MSC humaines et les cellules SaOS-2 de la mort cellulaire induite par la privation en sérum. Nous avons déterminé que la voie de l’adénylate cyclase-AMPc est impliquée dans cet effet protecteur. De même, l’ATP préserve l’activité des voies de signalisation MAPK ERK1/2 et p38 MAPK. Le facteur de transcription CREB pourrait être l’élément central de l’action protectrice du GIP et de l’ATP. Enfin, nos résultats suggèrent que, lorsqu’elles sont carencées en sérum, les MSC seraient capables d’activer un processus intrinsèque de survie via la libération de facteurs tels que l’ATP dans le milieu extracellulaire.