Résumé : RésuméLe présent travail a été réalisé dans et autour de la forêt de montagne du Parc National de Kahuzi-Biega (PNKB), à l’Est de la RD Congo. Ce site naturel de patrimoine mondial fut créé principalement pour protéger la sous-espèce de gorille, le Gorilla beringei graueri, une espèce en danger critique d’extinction. L’objectif de cette thèse est d’analyser le double usage des espèces végétales qui sont utilisées dans la médecine traditionnelle et dans le régime alimentaire des gorilles pour une gestion durable de la biodiversité, et en particulier, des ces espèces végétales les plus sollicitées par les tradipraticiens et qui sont utiles dans l’alimentation et potentiellement l’automédication des gorilles. Pour réaliser cette étude, nous avons abordé les tradipraticiens spécialistes ; nous avons fait des observations directes de gorilles de 4 groupes et nous avons évalué la végétation de leur habitat en forêt d’altitude du parc. L’analyse des données a été réalisée grâce aux approches de l’ethnobotanique quantitative et de l’écologie numérique.Les résultats montrent que, sur la base de l’usage de 77 espèces médicinales inventoriées, la typologie des tradipraticiens n’est pas basée sur leurs origines ethniques et géographiques mais sur leurs spécialités. Ils utilisent les mêmes plantes pour soigner les mêmes maladies. La forte convergence de leurs pratiques et le degré de consensus très élevé sur les plantes qu’ils utilisent pour traiter les maladies traduisent une tradition médicinale solidement ancrée au sein des groupes ethniques vivant dans cette région du Parc. Cependant, 83% des espèces utilisées par les tradipraticiens sont forestières. Les usages des plantes médicinales comparés aux choix alimentaires des gorilles montrent que 78 % des espèces végétales consommées par ces primates sont utilisées par les tradipraticiens, avec une similarité de 80% d’usage des parties de plantes. Ce chevauchement très élevé d’usages traduit une compétition potentielle pour les plantes à double usage. Il met en danger à la fois les plantes, les gorilles et la médecine locale.Cette thèse montre ainsi la nécessité de mieux comprendre les différentes spécialités médicinales au sein des ethnies et leur recours à certaines plantes spécifiques d’une part, et d’autre part , le besoin de mieux étudier les pratiques d’automédication du gorille de Grauer au PNKB.Ces enseignements contribueront à la conservation de ces espèces végétales à double usage à la fois utiles pour l’homme et pour les grands singes.AbstractThis work was carried out in the mountain region of Kahuzi-Biega National Park (KBNP) in eastern DR Congo. That natural site was primarily created to protect the lowland gorilla, Gorilla beringei graueri, a species in critical danger of extinction. The aim of this thesis is to analyze the dual-use of plants that are used both in traditional medecine and by gorillas in order to sustain the conservation management of plants most used by traditional healers and at the same time as food or for medication purposes by gorillas. For this study, we addressed traditional healers recognized as specialists in Batwa, Havu, Bashi and Tembo ethnic groups; we made direct observations of 4 groups of gorillas and assessed the vegetation within gorilla habitat in the mountain forest. Data analysis was conducted with two approaches: quantitative ethnobotany and numerical ecology. For 77 medicinal species identified, the results show that the typology of traditional healers relies on their specialisation than on ethnic and geographical membership. They use the same plants to treat the same diseases.The strong convergence of their practices and the high degree of consensus on plants they use to treat diseases reflect a consolidated medicinal tradition among ethnic groups living in this area of the Park. However, 83% of species used by traditional healers grow in the forest.The uses of medicinal plants compared to gorilla’s food choices show that 78% of plant species consumed by these primates are also used by traditional healers, with a similarity of 80% of use of plant parts. This high overlap of uses reflects a potential competition for dual-use plants, that endangers both plants, gorillas and local medicine.The topic thus shows the need of further studies for better understanding the different specialisation within local medicine and the use of specific plants on the one hand. The other hand, the self-medication practices of Grauer's gorilla in KBNP need to be investigated.These insights will contribute to the conservation of these dual-use plant species which are useful for both humans and great apes.Keywords: Traditional medicine – Traditional healers- Gorilla Grauer - Kahuzi-Biega- National Park- DR Congo.