Résumé : Comprendre l'effet de réactions chimiques sur les fluides en écoulement est une problématique au coeur de nombreuses applications telles que la remédiation de sols pollués ou le stockage géologique du CO2. Dans ce cadre, l'objectif de notre travail est de comprendre par une approche expérimentale dans quelle mesure une réaction chimique peut modifier le développement et les propriétés de motifs convectifs résultant d'instabilités hydrodynamiques dues à des gradients de densité dans le champ de gravité. Nos expériences sont effectuées par mise en contact de solutions aqueuses réactives ou de liquides non réactifs dans une cellule de Hele-Shaw verticale. Ce réacteur modèle constitué de deux plaques en verre séparées par un mince interstice est en effet communément utilisé pour l'étude de mouvements de fluides à l'échelle du laboratoire. Nous analysons dans divers cas les structures spatio-temporelles résultant du développement de profils de densité instables engendrés par des réactions chimiques, des processus de dissolution ou de diffusion croisée. Lors de notre thèse, nous avons tout d'abord étudié l'interaction entre une réaction acide-base et les instabilités hydrodynamiques dues à un gradient de densité, plus particulièrement la double diffusion et l'instabilité de Rayleigh-Taylor. Nous avons montré que cette simple réaction chimique de type A+B—>C brise la symétrie haut-bas caractéristique des motifs convectifs non réactifs. Nous nous sommes ensuite intéressés à une réaction chimique de cinétique plus complexe : la réaction oscillante de Belousov-Zhabotinsky. Nous avons séparé les réactifs dans l'espace de manière à localiser la réaction à l'interface entre deux solutions de composition différente. Notre objectif est d'ainsi obtenir un oscillateur localisé et d'en comprendre l'effet sur les instabilités hydrodynamiques. Pour ce faire, nous avons d'abord caractérisé les motifs réaction-diffusion qui se développent dans cette géométrie particulière. Nous avons montré qu'en l'absence de convection, la ségrégation spatiale des réactifs donne lieu à des variations spatiales de l'excitabilité, et par conséquent à l'apparition d'un ou deux trains d'ondes localisés spatialement. Dans le cas convectif, nous avons observé que ces trains d'onde peuvent également apparaître de manière localisée en fonction du type d'instabilité hydrodynamique qui se développe et que les réactions chimiques permettent d'obtenir de nouveaux motifs originaux. Nous avons également caractérisé les motifs hydrodynamiques qui apparaissent à cause de la diffusion croisée dans des microémulsions. Nous avons montré que, si le gradient de concentration d'une espèce peut engendrer un flux d'une autre espèce, une stratification instable de densité peut en résulter, ce qui engendre de la convection. Enfin nous avons étudié la dissolution convective d'une phase organique (formate d'alkyle) dans une phase aqueuse. Nous avons montré que lorsque le degré de miscibilité entre les deux phases augmente au-delà d'un certain seuil, les mouvements de fluide sont plus intenses. Nos résultats ont permis de comprendre l'effet de réactions bimoléculaires ou oscillantes ainsi que de la dissolution ou de la diffusion croisée sur les propriétés de structures de type réaction-diffusion-convection. Ces travaux ouvrent la voie à l'étude de nouveaux motifs spatio-temporels auto-organisés couplant le pouvoir organisateur des réactions d'une part et de l'hydrodynamique d'autre part et ce, tant dans des solutions aqueuses que dans des milieux plus complexes comprenant différentes phases.
The understanding of the effect of chemical reactions on fluid motions is an issue at the heart of numerous applications, such as polluted soil remediation or geological storage of CO2. In this context, the goal of our work is to understand through an experimental approach to what extent a chemical reaction is able to modify the development and the properties of buoyancy-driven convective patterns. Our experiments are carried out by putting in contact reactive aqueous solutions or non reactive liquids in a vertical Hele-Shaw cell. This model reactor consists in two glass plates separated by a thin gap and is commonly used to study fluid motions at the laboratory scale. We analyze in various cases the spatio-temporal structures resulting from the build-up of unstable density gradients due to chemical reactions, dissolution processes or cross-diffusion. During our thesis, we first studied the interplay between an acid-base reaction and buoyancy-driven instabilities, namely double diffusion and the Rayleigh-Taylor instability. We have shown that this simple A+B -->C type of reaction breaks the up-down symmetry which is characteristic of the non reactive patterns. Next we focused on a chemical reaction featuring more complex kinetics, namely the oscillating Belousov-Zhabotinsky reaction. The reactants were initially segregated in space in order to spatially localize the reaction at the interface between two solutions with different composition. Our aim is to obtain a localized chemical oscillator and to study its effect on buoyancy-driven flows. To do so, we first characterized the corresponding reaction-diffusion patterns which develop from this particular initial condition. We showed that, in the absence of convection, the spatial segregation of the reactants produces spatial gradients in the excitability and hence the nucleation of one or two spatially localized wave trains. We observed that in the presence of convective motions, these wave trains can also appear and remain localized, according to the type of buoyancy-driven instability which is at play. Moreover the chemical reaction triggers the onset of additional patterns. We have also characterized the hydrodynamic patterns which appear due to cross-diffusion in microemulsions. We have shown that, if a concentration gradient of one species is able to trigger a flux of another species, an unstable density stratification may appear and cause the onset of convection. Finally we have studied the convective dissolution of an organic phase (alkyl formate) into an aqueous phase. We have shown that, above a certain threshold, an increase in the miscibility between the two phases leads to an increase in the intensity of the fluid motions. Our results help to understand the effect of bimolecular or oscillating reactions, dissolution processes and cross-diffusion on the properties of reaction-diffusion-convection structures. This work paves the way towards the study of novel self-organized spatio-temporal patterns coupling the organizing power of chemical reactions and of hydrodynamic flows, both in aqueous solutions and multiphase media.