Résumé : Ips typographus est le principal ravageur de l'épicéa en Europe, s’attaquant en masse aux arbres vivants en période d’épidémie, par le biais d’une communication chimique. Comme de nombreuses autres espèces de scolytes « agressives », le typographe se reproduit uniquement sur des arbres affaiblis ou des chablis en périodes d’endémie, quand les densités de population ne sont pas suffisantes pour surmonter les défenses des arbres vivants. Ces ressources sont en général présentées dans la littérature comme étant dispersées et imprédictibles dans le temps et l’espace. De plus, ces ressources affaiblies sont sans doute disponibles pour de nombreuses espèces compétitrices. Ces caractéristiques imposent des contraintes importantes sur la dynamique de population et l’écologie du typographe et principalement sur sa stratégie de prospection. Cela dit, cette espèce et ces questions sont très peu étudiées en période d’endémie.Durant ma thèse de doctorat, je me suis attelé à tout d’abord caractériser les facteurs déterminant la distribution spatio-temporelle des chablis, qui va influencer l’évolution des stratégies de dispersion. Cet aspect s’est prolongé par l’étude de la « durée de vie » des chablis, c’est-à-dire la période durant laquelle ils sont colonisables par les scolytes après déracinement. Cet aspect a été mis en parallèle avec les capacités de défenses de ces mêmes arbres et leurs effets sur la sélection de l’hôte et le succès des scolytes. Enfin, les données obtenues par ces études ont été intégrées à un modèle spatialement explicite visant à valider les hypothèses comportementales relatives à la prospection pour les ressources chez le typographe, à savoir une dispersion aléatoire à grande distance suivie d’un recrutement au niveau des ressources nouvellement trouvées.Les résultats obtenus au cours de cette thèse confirment l’importance de la prospection sociale et de l’agrégation dans la découverte et l’exploitation de ressources dispersées, dont la dégradation intrinsèque représente une faible contrainte temporelle. Ces comportements ont sans doute été développés chez des insectes saproxyliques en raison de l’avantage qu’ils apportent en termes de découverte de ressources. Dans un second temps, ces comportements auraient pu permettre l'attaque d‘arbres vivants, notamment en réponse à une pression de compétition inter-spécifique importante sur des ressources peu défendues.